
Jeudi soir, à l'UNESCO, une gare du Val-de-Marne a décroché le Prix Versailles. Villejuif–Gustave Roussy, avec son gratte-ciel inversé et son univers futuriste, devient officiellement la plus belle gare du monde en 2025. Une victoire pour la banlieue, et un signal fort : le beau n'est plus réservé à Paris intra-muros.
C’est une cathédrale de métal et de lumière, à 50 mètres sous terre, en plein Val-de-Marne. Ce mercredi 4 décembre, au siège de l’UNESCO à Paris, la gare de Villejuif–Gustave Roussy a été sacrée plus belle gare du monde par le Prix Versailles. Oui, vous avez bien lu : la plus belle du monde. Pas la plus belle de France, pas la plus belle d’Europe. Du monde.
Un jury qui ne rigole pas
Mal connu, voire inconnu du grand public, le Prix Versailles, c’est pourtant du sérieux. Créé en 2015 en partenariat avec l’UNESCO et l’Union internationale des architectes, il distingue chaque année ce qui se fait de mieux en architecture à travers huit catégories : aéroports, campus, musées, hôtels, restaurants, stades, grands magasins… et gares.
Et pour départager les candidats, pas n’importe qui autour de la table. Cette année, c’est Irina Bokova, ancienne directrice générale de l’UNESCO (excusez du peu), qui présidait le jury. À ses côtés : le pianiste star Lang Lang, l’actrice Emma Watson, les architectes Thom Mayne et Ma Yansong, l’artiste conceptuel argentin Leandro Erlich, la créatrice de mode Iris van Herpen et l’actrice et réalisatrice Maria de Medeiros. Un casting très international et VIP. À l’image de la concurrence.
Face aux stars de l’architecture mondiale
Villejuif n’était pas seule en lice. Elle a devancé six mastodontes de l’architecture mondiale : La gare de Gadigal à Sydney, première station du tout nouveau métro australien. La gare de Mons en Belgique, signée par le star-architecte Santiago Calatrava. La gare de Baiyun à Canton (Chine), avec un parc urbain vertical. Deux gares à Riyad, en Arabie saoudite: KAFD, conçue par Zaha Hadid Architects, et Qasr Al Hokm. Et notre voisine de Saint-Denis–Pleyel, elle aussi en finale, signée par le Japonais Kengo Kuma. Bref, deux gares franciliennes dans le top 7 mondial, et c’est la banlieue sud qui rafle la mise. C’est un beau signal.
Un gratte-ciel à l’envers
Derrière cette prouesse, il y a un architecte français de renom : Dominique Perrault, déjà auteur de la Bibliothèque nationale de France. Pour Villejuif, il a imaginé ce qu’il appelle un « gratte-ciel inversé » : un vertigineux cylindre de 70 mètres de diamètre qui plonge à près de 50 mètres sous terre.
En surface, un vaste parvis piéton s’ouvre sur un pavillon coiffé d’une verrière spectaculaire, qui floute la frontière entre intérieur et extérieur. En dessous, neuf niveaux où l’inox – lisse, maillé, perforé, poli miroir – joue avec la lumière naturelle qui descend jusqu’aux quais. « Il y a quelque chose d’assez futuriste qui relève presque de la conquête spatiale », nous a partagé Pierre-Emmanuel Becherand, directeur Architecture et Culture de la Société des grands projets, qui construit le métro du Grand Paris Express.
Bien plus qu’une gare : une porte d’entrée sur le territoire
Inaugurée le 18 janvier dernier sur la ligne 14, la gare de Villejuif–Gustave Roussy change déjà la vie de milliers de personnes. Elle dessert directement l’Institut Gustave-Roussy, premier centre européen de recherche et de soins contre le cancer. Pour les malades qui viennent s’y faire soigner, pour les personnels soignants qui y travaillent au quotidien, pour les chercheurs qui y font avancer la science, l’arrivée du métro est une petite révolution. Fini les correspondances interminables et les trajets à rallonge. Avec la ligne 15 qui arrivera en 2026, ce sera encore mieux.
Mais cette gare, c’est aussi une porte d’entrée sur un coin du Val-de-Marne qu’on connaît trop peu. À vraiment deux pas, le parc des Hautes-Bruyères : 25 hectares un peu cabossés, plantés sur une ancienne carrière de sable. On s’y croirait presque à la campagne, avec ses vallons, ses prairies qui ondulent et ses vues dégagées sur le sud parisien. Et malgré la toute proche A6…
Pour ceux qui ont envie de marcher, c’est la gare IGR, c’est le début de l’aventure. On peut descendre vers la Bièvre, cette rivière discrète qui coule par intermittence en contrebas, et suivre sa vallée verdoyante. Ou partir dans l’autre sens, vers la Seine. D’ailleurs, la future trame verte Seine-Bièvre va bientôt relier tout ça : du parc des Hautes-Bruyères jusqu’au MAC VAL à Vitry, une grosse heure à pied pour les curieux. Nature et art contemporain au programme, pas mal pour un dimanche.
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5 décembre 2025 - Villejuif