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J’ai testé la piscine Art déco de Pantin avec l’instagrameuse Nageuse parisienne

La piscine Alice Milliat à Pantin / © Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris
La piscine Alice-Milliat à Pantin / © Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris

Rouverte l'été dernier, la piscine Alice-Milliat de Pantin est un fleuron Art déco qu'est allée tester Joséphine Lebard. À ses côtés : Nageuse parisienne qui, depuis plusieurs mois, se fait fort de nager dans toutes les piscines de Paris et d'en raconter l'histoire sur son compte Instagram.

« C’est la première fois que vous venez nager ici ? »

On ne la fait pas au personnel de la piscine Alice-Milliat de Pantin (93). Alors que je patiente devant le bâtiment, l’homme qui arbore un T-shirt siglé Est Ensemble (la communauté d’agglomérations qui gère le lieu) repère d’entrée de jeu la novice que je suis. Il faut dire que j’envoie tous les signaux de la débutante : le nez en l’air, je détaille la vaste façade en béton armé parée de briques. Après deux ans de rénovation, la piscine a rouvert ses portes en juillet dernier.

« J’attends quelqu’un », expliqué-je à mon interlocuteur, bientôt rejoint par un de ses collègues.

« Ah ben, prenez une friandise », m’indique son collègue en me tendant un emballage rouge vif.

Premier constat, et pas des moindres : on est royalement accueilli dans cette piscine ! J’empoche le bonbon pour le manger plus tard. Ça ferait mauvais genre d’accueillir ma compagne de nage du chocolat plein la bouche. Car j’ai rendez-vous avec la mystérieuse Nageuse parisienne : depuis plusieurs mois, la jeune femme se fait fort de tester toutes les piscines de Paris et d’en raconter l’histoire sur son compte Instagram. Je l’avais interviewée au début de son aventure aquatique. Aussi l’idée de lui faire traverser le périph pour tester une piscine en banlieue m’apparaissait-elle comme une légère – et audacieuse – entorse à son programme. Raté : « J’y suis déjà allée une fois, le jour de son ouverture au public », m’apprend-elle, avant d’évoquer le nom donné à la piscine. Auparavant piscine Leclerc, elle a été rebaptisée du nom d’Alice Milliat. « Elle a beaucoup fait pour le sport féminin, notamment en confondant en 1917 la Fédération des sociétés sportives féminines de France, m’indique Nageuse parisienne. Elle pratiquait non seulement la natation mais aussi l’aviron»

Nous, ce ne sont pas les rames que nous sortons, mais nos maillots. Pour ce faire, direction le premier étage de la piscine, parcourue de coursives. « C’est une piscine qui a été très très bien refaite », approuve Nageuse parisienne. En effet, les balustrades et les portes des cabines sont peintes d’un magnifique bleu de Sèvres. En se penchant au-dessus des rambardes, on a une vue plongeante sur le bassin de 33 mètres. C’est simple : on a le sentiment d’être à la piscine Molitor (16e) mais au tarif municipal. Nageuse parisienne attire mon attention sur les casiers aux douces teintes de bois blond, bien éloignées des teintes criardes qu’on trouve habituellement. « Ce sont des couleurs qu’on ne voit jamais et qui contribuent à réchauffer l’atmosphère» Quant aux cabines, elles sont spacieuses, disposent chacune d’une fenêtre et de deux patères. Royal au bar…

Une eau qui semble très peu chlorée

Nous nous dirigeons vers le bassin de 33 mètres. D’ailleurs, pourquoi cette longueur improbable ? Habituellement, je nage plutôt en 25 ou en 50… J’ai la réponse dans le très bon livre Sports et architecture en Seine-Saint-Denis qu’a consacré au sujet le service Patrimoine du Département de Seine-Saint-Denis. 33 x 12,50 mètres, ce sont les dimensions adaptées aux compétitions des années 30. Car la piscine a vu le jour en 1937. « C’est le fils du maire de l’époque, Charles Auray, qui en a été l’architecte, note Nageuse parisienne. Les briques, les escaliers qui descendent dans le bassin, les coursives… On dirait qu’il a été très inspiré par la piscine Pailleron, dans le 19e arrondissement de Paris, signée en 1933 par l’architecte Lucien Pollet. » Le livre m’indique qu’Auray se serait effectivement inspiré du monsieur, mais plutôt pour les piscines Molitor et de la Jonquière dont Pollet fut aussi l’architecte, respectivement en 1929 et 1933.

Mais laissons là les considérations historiques et plongeons dans le bassin. Par rapport à ma piscine habituelle, celui-ci possède une ligne de nage en moins et je le sens un peu. J’ai l’impression d’être un petit peu à l’étroit. Nageuse parisienne relativise. Pour elle qui a l’habitude des piscines parisiennes, « c’est parfait en termes de condition de nage. Ici, c’est facile de doubler et de retrouver sa place », note-t-elle avant de repartir pour une longueur de crawl fluide. Pour elle, les bémols se situent ailleurs : le bassin démarre à une profondeur de 80 cm, ce qui est un peu juste quand on entame ou termine sa longueur. Et, contrairement à moi, elle ne raffole pas de la verrière qui nous surplombe : « Ça crée une lumière un peu crue et retire un peu d’intimité. Mais c’est vraiment quelque chose de personnel… » Pour ma part, en plus de la beauté des lieux, je note un autre bon point à mettre au crédit de l’endroit : l’eau semble très peu chlorée et donne presque le sentiment de nager en eau douce.

La piscine Alice Milliat à Pantin / © Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris
© Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris

Un personnel aux petits soins

Évidemment, le niveau de chlore est le même que dans les autres piscines mais la méthode choisie est différente. Ici, pas de chlore liquide mais des pastilles de sel, nous indique un maître-nageur sauveteur (MNS). Car oui, c’est une autre qualité qui plaide en faveur de la piscine Alice-Milliat : de la caisse aux MNS en passant par le staff technique, le personnel est extrêmement aimable et disponible pour les usagers.

Direction l’autre bassin de 25 mètres situé dans la partie neuve de la piscine. Pour nous y rendre, nous traversons un couloir couleur framboise écrasée. « On sent qu’on change d’ambiance, souligne Nageuse parisienne. Le premier bassin ressemblait à un bateau sur la mer ; ici, on est dans quelque chose de plus chaud» Nous voilà dans une vaste salle blanche parée de linteaux de bois. Je m’exclame : « On dirait une piscine d’hôtel ! » Nageuse parisienne fronce du nez devant ma remarque de béotienne. « Non, une piscine d’hôtel, pour moi, c’est vraiment fait pour barboter… En revanche, on sent qu’ici ils ont assumé de faire un bassin plus ludique, plus familial. »

En ce mercredi après-midi, deux enfants suivent un cours de natation tandis qu’une femme enchaîne les longueurs et les exercices. Il se trouve que c’est une MNS qui pratique son crawl avant de prendre son service. « Moi, je préfère nager ici, confirme-t-elle, mais j’ai une collègue qui préfère le 33 mètres» Même si le bassin ne fait que 1,20 m de profondeur, je trouve moi aussi que ma nage y est plus fluide, même s’il est dépourvu de lignes. Il faut dire qu’on ne se marche pas dessus : nous sommes quatre à évoluer dedans. Je resterais bien y faire la planche en contemplant les lames blanches qui descendent du plafond. Ou à traînailler le regard perdu sur les briques rouges du bâtiment historique qu’on aperçoit depuis la baie vitrée. Mais voilà : l’échappée aquatique doit laisser place aux réalités terrestres, en l’occurrence d’autres obligations à honorer pour Nageuse parisienne et un article à écrire pour moi. En croquant dans mon bonbon chocolaté, je me promets de revenir. Si Paris vaut bien une messe, la belle piscine Alice-Milliat vaut bien quelques infidélités à mon bassin habituel…

Infos pratiques : Piscine Alice-Milliat, 49, avenue du Général Leclerc, pantin (93). Ouvert tous les jours. Tarifs : de 2,20 € à 5,50 €. Accès : métro Hoche (ligne 5), gare de Pantin (RER E), tramway T3b arrêt Ella Fitzgerald. Plus d’infos sur est-ensemble.fr

La piscine Alice Milliat à Pantin / © Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris
© Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris

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