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Le vélo cargo change de braquet en ville

Depuis 2018, les ventes de vélo cargo ont triplé en France / © Carlos Felipe Pardo
Depuis 2018, le chiffre d’affaires des ventes de vélos cargos a triplé en France / © Carlos Felipe Pardo

Alors qu'on est passé de 1 000 ventes de vélos cargos en France en 2018 à plus de 8 000 en 2021, Enlarge your Paris s'est intéressé à ce mode de déplacement qui n'en finit pas de faire des émules.

Comment passer à côté de ce jeu de mots facile mais néanmoins tentant ? Le secteur du vélo cargo est une filière qui a le vent dans le dos. Selon une étude menée par Les Boîtes à Vélo, en 2018, on comptait 1 038 vélos cargos vendus en France. En 2020, on en dénombrait 3 339. Et, pour 2021, on atteint quelque 8 600 ventes. Entre 2018 et 2020, le chiffre d’affaires de la filière française a tout simplement triplé. Pour Alexis Angioletti, fondateur de Fleeter, qui propose la location et la vente de vélos cargos, il ne s’agit pas d’un effet de mode mais bien d’une tendance de fond. « La croissance est exponentielle, souligne-t-il. En 2020, mon chiffre d’affaires s’élevait à 370 000 euros. Pour 2022, je prévois d’atteindre 800 000 euros. » Si la mise en place de Véligo cargo et le déploiement des coronapistes ont favorisé l’essor du vélo cargo, pour Renaud Gohin, l’engouement pour ce mode de transport remonte à un peu plus loin. « Ce sont les livreurs qui, les premiers, les ont utilisés, rappelle le fondateur du Petit Porteur, société de fabrication de vélos cargos. L’émergence chez les particuliers est d’abord née du fait de voir des professionnels s’en servir. »

De fait, les artisans ont vite vu l’intérêt qu’ils pouvaient tirer de l’usage du vélo cargo, notamment à Paris. Menuisiers, frigoristes, dératiseurs, fleuristes… Alexis Angioletti énumère la variété des profils qui font appel à ses services. « Cela leur permet de revenir dans des quartiers où leurs concurrents véhiculés ne peuvent se rendre pour des raisons de stationnement. Ils gagnent en ponctualité et optimisent leur chargement », explique-t-il. Mais, plus encore, le vélo cargo permet à une nouvelle génération d’entrepreneurs de mettre en adéquation leurs valeurs et leur mode de déplacement. Comme le résume Alexis Angioletti, « le plombier qui a une conscience écolo n’a pas forcément envie de se déplacer dans une camionnette diesel ». Sans oublier la dimension communication : un vélo cargo floqué attire l’œil. Et est d’autant plus visible des potentiels clients qu’il circule à 20 km/h, sans laisser dans son sillage une fumée de pot d’échappement…

Les femmes, utilisatrices précurseures

Pour Alexis Angioletti, on peut établir un portrait-robot de l’utilisateur de vélo cargo. Ou plutôt de l’utilisatrice, car « ce sont majoritairement des femmes entre 30 et 45 ans. Elles ont des enfants, plutôt petits encore, et ont un timing journalier serré. On ne va pas se mentir, elles appartiennent aux catégories socio-professionnelles plutôt aisées ». Renaud Gohin complète le portrait en y ajoutant une touche géographique. « Je vends deux vélos sur trois dans le Nord-Est parisien. Les 18e, 19e et 20e, mais aussi Pantin, Bagnolet, Montreuil… »

Cécile rentre donc dans le cadre. Quadra pantinoise, elle s’est initiée au vélo cargo en louant un Véligo. « Cela représente quand même un investissement conséquent, je préférais donc tester avant d’acheter. » Elle n’a pas été longue à convaincre. Après un mois d’essai, elle acquiert son propre engin. Si elle ne se sent pas encore de l’utiliser pour aller travailler, elle privilégie un usage local et s’en sert pour déposer ses filles de 6 et 4 ans à l’école et faire les courses. « Concernant les enfants, il y a vraiment un aspect ludique. Bizarrement, elles traînent beaucoup moins pour se préparer quand elles savent qu’elles montent dans la nacelle. Pour les courses, je peux sans problème charger des packs d’eau et une quantité de marchandises qui, auparavant, m’obligeait à prendre la voiture. »

Victime de son succès

Pour Renaud Gohin, c’est d’ailleurs l’un des enjeux du vélo cargo en ville : « Il peut tout à fait remplacer une petite citadine, estime-t-il. Sur le mien, je peux charger jusqu’à 30 kilos de marchandises. » Quant à Alexis Angioletti, il n’utilise désormais sa voiture qu’une fois par semaine pour ses déplacements professionnels, « voire une fois par mois ! Parce que le vélo cargo coche toutes les cases : celles de l’utilitaire mais aussi du plaisir. Quand on possède un vélo cargo, on peut envisager de se passer d’un véhicule motorisé. Ce qui n’est pas le cas avec le simple vélo ». Une seule ombre au tableau : le manque de pièces disponibles qui ne permettent pas, pour le moment, de répondre à la totalité de la demande. C’est ce qu’on appelle la rançon de la gloire…

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