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Je suis parti à la cueillette en forêt de Rambouillet, l’une des 5 meilleures forêts à champignons de France

La forêt de Rambouillet, aussi grande que Paris, est un des spots du Grand Paris pour trouver du muguet / © Pline
La forêt de Rambouillet, aussi grande que Paris, est un des spots du Grand Paris pour trouver des champignons / © Pline (Wikimedia commons)

D'après le Routard et son guide "Expériences et micro-aventures en France", la forêt de Rambouillet ferait partie des cinq meilleures forêts de l'Hexagone pour les champignons. Correspondant pour la BBC, John Laurenson est allé y faire ses courses en compagnie de Mathieu Andro, le créateur du site identifier-les-champignons.com.

Depuis 2023, le journaliste et correspondant pour la BBC John Laurenson partage avec nous son regard sur la banlieue à travers la série « Le Grand Paris est une fête », en hommage au Paris est une fête d’Ernest Hemingway.

Il est neuf heures passées depuis peu quand Mathieu passe me chercher avec deux paniers en osier. Le soleil se cache encore derrière la brume lorsque l’on pénètre dans la forêt de Rambouillet (Yvelines) plus grande que Paris (les lecteurs fidèles d’Enlarge your Paris le savent) et parmi les cinq meilleures forêt à champignons de France selon Le Routard. Déjà, les yeux de Mathieu se mettent à scruter. « Souvent, on en trouve tout de suite ! » me souffle-t-il. « Les cèpes, par exemple, aiment la lumière. On les cueille souvent le long des chemins ». Surtout lorsqu’on vient faire ses courses tôt le matin. Si la tête d’un cèpe peut atteindre la taille de celle d’un bébé, c’est une exagération populaire de dire qu’il pousse en un jour. Toutefois, quand les températures sont douces et la terre humide, il peut très bien grandir de quelques centimètres en quelques heures. Ça vaut donc toujours le coup de regarder, un beau cèpe de Bordeaux vient peut-être de percer les feuilles au bord du chemin just for you. J’en ai découverts comme ça par le passé. Dix, quinze centimètres de haut. Pieds bien dodus, chapeaux couleur châtaigne, visqueux et brillants au soleil, de vrais tabourets d’elfe.

« Regarde, une amanite citrine ! », me lance Mathieu. Je regarde. Il est beau. Blanc avec une nuance de vert comme un sorbet au citron. Est-il comestible ?  Tous les champignons sont comestibles répondent les Russes à cette question, mais certains ne le sont qu’une fois.  C’est le cas de cette jolie amanite parfaitement toxique. « Sa particularité est de sentir la patate crue », me fait remarquer Mathieu. Je la renifle. C’est vrai. Mathieu aime bien les odeurs des champignons. « J’ai renseigné toute une taxonomie d’odeurs sur mon site web, m’indique-t-il. Une soixantaine en tout. Il y a des trucs incroyables. Ail, anis, bouillon cube, poisson, betterave…».

L’arbre qui cache la forêt… de champignons

Nous passons par une forêt de bouleaux. Par terre, de superbes amanites tue-mouches rouges à pois blancs (toxiques bien sûr, et pas seulement pour les mouches). « Elles sont toujours là où on trouve les bouleaux, me précise Mathieu. Les champignons, ça dépend aussi des arbres. Les morilles aiment les frênes par exemple. » Quant aux cèpes, ils s’épanouissent au milieu des châtaigniers et des chênes. Les pins attirent pour leur part les chanterelles à partir de fin octobre et ce jusqu’à début décembre. Et en ce moment, ce sont les bolets bais. Justement… On quitte notre chemin pour un joli coin de pins. Très vite, on en trouve un, deux, trois…

Le bolet bai, c’est un peu le cèpe de Bordeaux du pauvre. Il n’a pas sa magnifique rondeur et sa chair est moins dense, moins ferme, mais il est plus facile à trouver. La première chose pour différencier les champignons consiste à regarder sous leur chapeau. Très souvent, ils sont composés de lamelles. Ceux-là, vous pouvez les laisser. Il y a bien quelques champis à lamelles bons pour la poêle comme la coulemelle mais pour le débutant il vaut mieux faire simple : passer son chemin.         

En revanche, les champis à mousse sont de bien meilleurs présages. Dans la grande famille des bolets, dont les cèpes font partie, la mousse peut être beige, crème, jaune ou – c’est le cas pour le bolet bai – d’un vert un peu doré mais terne. Le chapeau est marron. Éventuellement luisant. La tige est superbement obèse dans le cas du cèpe de Bordeaux ou bien droite comme un jean slim pour le bolet bai. Avec le cèpe de Bordeaux, tout se mange hormis la partie terreuse au bas du pied. Pour le bolet bai, il faut jeter le pied et même la mousse pour ne garder que la partie la plus compacte du chapeau. En fait, conseille Mathieu, les bolets conviennent parfaitement aux débutants. Faciles à reconnaître grâce à leur mousse, il y en a peu qui sont toxiques et aucune mortelle.

Un bolet bai en forêt de Rambouillet / © John Laurenson pour Enlarge your Paris
Un bolet bai en forêt de Rambouillet / © John Laurenson pour Enlarge your Paris

 » J’aime bien l’état dans lequel on se trouve quand on cherche les champignons »

Bon à savoir : quand vous trouvez un champignon, poussez les investigations autour. Vous en découvrirez peut-être plein d’autres. Mathieu a un truc. Il tourne autour en traçant la forme d’un escargot. « J’aime bien l’état dans lequel on se trouve quand on cherche les champignons, me confie Mathieu. On est tranquillement concentré. On n’a de pensées que pour ça. Ni pour le futur ni pour le passé. On est pleinement au présent. »

Mathieu m’emmène à présent dans un coin à champignons qu’il affectionne. Une petite vallée en dehors des chemins tenue par de grands chênes. Un coin à cèpes… sans cèpes. Il est encore trop tôt. Le pic de la saison n’est pas encore arrivé. Mais on trouve ici quelque chose de tout aussi bon : la trompette de la mort. Contrairement à ce que son nom laisse penser, elle n’est pas toxique. Loin de là. Ce nom, elle le doit à sa couleur noire, très noire. Et à sa forme en cornet. Pas plus haute que 5 centimètres, elle se niche au milieu des feuilles et de la végétation. « Pour en trouver, il faut prendre le temps de vraiment ralentir pour scruter encore davantage », recommande Mathieu. Et ça marche ! Mon panier commence à se remplir. Grand seigneur, Mathieu me laisse le contenu du sien à la fin de la balade. Le soir-même, je cuisine les trompettes. A la cuisson, elles deviennent luisantes comme des spaghettis à l’encre de seiche et délicieuses ! En dégustant, je pense déjà au prochain week-end… et aux cèpes qui sont sans doute en train de pousser. 

Infos pratiques : plus d’infos sur identifier-les-champignons.com. En cas de doute, demander un avis. Et pour déguster des champignons même lorsque l’on rentre bredouilles, deux restaurants grand-parisiens cuisinent les champignons sauvages : Au Cœur de la forêt, avenue du Repos de Diane, à Montmorency (95) et Au Petit Marguery, 9, boulevard de Port-Royal à Paris (13e)

Mathieu Andro est le créateur du site identifier-les-champignons.com / © John Laurenson pour Enlarge your Paris
Mathieu Andro est le créateur du site identifier-les-champignons.com / © John Laurenson pour Enlarge your Paris

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