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Des ateliers pour adapter le futur métro du Grand Paris Express aux différents handicaps

Un atelier consacré à l'accessibilité des équipements du Grand Paris Express à la Fabrique du métro à Saint-Ouen / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
Un atelier consacré à l’accessibilité des équipements du Grand Paris Express à la Fabrique du métro à Saint-Ouen / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris

Alors que les premières rames du métro du Grand Paris Express doivent circuler à partir de 2024, des ateliers sont organisés avec les associations de personnes handicapés à la Fabrique du métro à Saint-Ouen pour poursuivre la conception des équipements adaptés aux différentes formes de handicaps.

Ce reportage a été réalisé dans le cadre d’un partenariat avec la Société du Grand Paris

« Tout est toujours perfectible mais nous avons le sentiment d’être écoutés ». Le 15 octobre dernier, plusieurs responsables d’associations de personnes handicapées étaient accueillis à la Fabrique du Métro à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), qui abrite la reproduction à l’échelle une d’une future gare de la ligne 15 du Grand Paris Express. Organisé dans le cadre d’une concertation ouverte en 2015, cet atelier dédié à l’accessibilité visait à s’assurer que les nouveaux distributeurs automatiques de titres et que la rame du futur métro répondaient aux besoins des usagers en situation de handicap, qu’il soit moteur ou sensoriel. 

Cette démarche d’échange avec les représentants des personnes handicapées, désormais courante dans le domaine des transports publics, parvient toutefois avec le chantier du Grand Paris Express à un niveau jamais atteint, de l’avis des participants. « Nous n’avons jamais été associés aussi tôt dans un projet de conception », confie ainsi Julia Tabath, administratrice de l’AFM-Téléthon, qui évoque « une démarche inédite »

Laurent Colin, responsable du pôle Fonctionnalités et Programme à la Société du Grand Paris s’est en effet engagé dès le lancement du projet du nouveau métro à « aller au-delà de l’aspect réglementaire » lié à l’accessibilité des équipements pour les personnes handicapées afin de « coller au mieux aux besoins réels des usagers » et surtout répondre à la notion de conception universelle. « L’enjeu de notre démarche, c’est de gommer l’accessibilité, qu’elle ne soit plus une question. Si nous parvenons à construire une gare où l’on ne se demande plus si tel équipement est destiné aux personnes handicapées, c’est que nous aurons réussi notre pari », explique-t-il. 

Co-concevoir des équipements adaptés 

Au cours de cette dernière réunion, les participants ont pu tester les équipements qu’ils avaient eu l’opportunité de découvrir en réalité virtuelle lors d’un précédent atelier en janvier 2019. Premiers à passer sur le grill, les distributeurs de billets présentent « une innovation inédite » selon Laurent Colin. Ce sont en effet les premières bornes à disposer d’un décaissement sur leur partie inférieure permettant aux personnes en fauteuil roulant de pouvoir les aborder de face en glissant leurs jambes sous le pupitre. « C’est vraiment un progrès, ce n’est le cas nulle part ailleurs aujourd’hui », se réjouit Julia Tabath. 

Parmi les autres demandes des associations qui ont été prises en compte par les concepteurs du Grand Paris Express, l’inclinaison du pupitre, l’éclairage des distributeurs et l’insertion de  balises sonores, d’une webcam, d’un micro et d’une prise jack pour les personnes souffrant de déficiences visuelles. La signalétique, elle, suscite encore quelques interrogations. « On ne comprend pas assez facilement si tel distributeur n’est accessible qu’aux utilisateurs munis d’une carte bancaire et si l’on peut acheter des tickets physiques sur l’ensemble des bornes », lance un participant. Les représentants de la Société du Grand Paris prennent note de leurs remarques et assurent qu’elles seront intégrées au cahier des charges, tout en rappelant les contraintes techniques et graphiques auxquelles ils sont confrontés ou qui sont demandés par Île-de-France Mobilités.

Un atelier consacré à l'accessibilité des équipements du Grand Paris Express à la Fabrique du métro à Saint-Ouen / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
© Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris

Des points encore sensibles

Sur les quais reconstitués du futur métro, tous les acteurs sont invités à pénétrer dans la rame. Si l’accès de plein pied est mis en œuvre, le franchissement pour les trois personnes en fauteuil reste une épreuve de vigilance. L’un d’eux démontre la criticité du piège que constitue l’interstice entre le quai et le train si le fauteuil ne rentre pas bien droit. En manœuvrant à cet endroit, sa roue avant se trouve bloquée. Cet espace de cinq centimètres permet au métro de ne pas heurter le quai à son passage. Incompressible, il alimente les débats. « Même si cela est conforme à la réglementation, cinq centimètres, c’est énorme pour un fauteuil », souligne Muriel Larrouy, membre de la délégation ministérielle à l’accessibilité. « On ne peut pas faire du neuf pour les 45 ans à venir qui ne soit pas utilisable par tous », poursuit-elle. « Aujourd’hui, nous avons le temps d’entrer doucement et sommes entourés de personnes bienveillantes mais nous ne sommes pas en situation d’usage réel », renchérit Julia Tabath qui décrit le système proposé « d‘enfer même pour les personnes âgées ou les poussettes ».

A l’intérieur de la rame, les usagers se félicitent toutefois de quelques avancées. « Nous avons insisté pour qu’il y ait des espaces vides sous les sièges afin que les chiens-guides puissent s’installer en-dessous de leurs maîtres et qu’ils ne restent pas au milieu du couloir. Notre demande a été prise en compte », souligne par exemple Rémi Fadel de la Confédération française pour la promotion sociale des aveugles et amblyopes. La taille de l’espace réservé aux personnes à mobilité réduite, la largeur de l’allée centrale de la rame ainsi que l’éclairage de la barre centrale sont également applaudis. « Les indicateurs sont encourageants mais il faut rester vigilants car certains points sont encore sensibles », conclut Julia Tabath.

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