Culture
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À l’ombre du Palais du Roi Soleil, tête-à-tête avec des chefs-d’œuvre du post-impressionnisme

A deux pas du château de Versailles, le charmant musée Lambinet expose quelques chefs-d'œuvre du post-impressionnisme rassemblés par un couple de collectionneurs passionnés. Le visiteur se laisse toucher par les vibrations chromatiques de toiles de Signac, Luce et Moret, dans un cadre intimiste qui abolit les distances et laisse toute la place à la contemplation. Bien loin de la foule toute proche.

« C’est un peu David contre Goliath, cette affaire… » Face au musée Lambinet à Versailles (Yvelines), une habitante soupire. Il est vrai qu’ici le château peut avoir tendance à tout écraser sur son passage et à faire oublier les autres institutions culturelles. À tort, car le musée, sis dans un élégant hôtel particulier du XVIIIe siècle, propose actuellement une très belle exposition : « Passion post-impressionniste ».

Cette passion, c’est celle d’un couple : Fernande et Marcel Guy. Négociants, les époux, sous l’influence de Fernande, ont constitué une riche collection de toiles signées Paul Signac, Maximilien Luce ou encore Henry Moret. Mais au fait, qui sont les post-impressionnistes ? Comme le nom de leur courant l’indique, ils émergent à l’orée des années 1880 et veulent repousser encore plus loin les limites de l’impressionnisme, utilisant le pointillisme ou le symbolisme. Fernande Guy s’entiche de ces peintres qui font la part belle aux extérieurs, qu’il s’agisse de paysages de bord de mer ou de vues franciliennes. Elle court les ventes à Drouot pour étoffer une collection mue par un maître-mot : le coup de cœur.

Les Guy ont aussi un sacré coup d’œil. Pour s’en rendre compte, il suffit de se poster devant Paris, vue de la Seine, la nuit, une huile sur toile de 1893 signée par Maximilien Luce. Impossible de rester de marbre face à ce camaïeu de mauves et à ce délicat ciel crépusculaire dont les nuances se réverbèrent dans l’eau de la Seine. Ou face à Grosse mer de Maxime Maufra, exécuté vers 1894, qui montre une vague se fracassant contre une falaise avec de somptueux aplats de vert et de bleu pour figurer toutes les nuances de l’eau. Quant à la Nature Morte de William Malherbe, peinte en 1922, dans laquelle des pommes se reflètent dans le bois ciré d’une table, elle offre comme un écho au travail de la lumière chez Pierre Bonnard.

Sans descendance, les Guy ont souhaité que leur collection ne soit pas dispersée et, au soir de leur vie, ont cherché un musée francilien auquel en faire don. C’est donc le musée Lambinet de Versailles qui a finalement eu leurs faveurs et il est assez touchant, dans la première salle de l’exposition, de voir, exposés dans une vitrine, les documents notariaux établissant ce legs. Tout comme les dessins signés Signac ou Puvis de Chavanne, constituant un joli cabinet d’arts graphiques.

Au-delà des toiles chamarrées – restaurées pour l’occasion – qui mettent le cœur des visiteurs en joie, l’exposition a d’autres raisons de plaire au public. Pour un « petit musée », la scénographie est particulièrement soignée : la couleur des salles fait écho à celles des peintures. Quant aux cartels, ils dénotent un souci de pédagogie et d’exhaustivité qui permet de sortir enrichi de la visite et qu’on aimerait trouver plus souvent dans les musées. Chaque peinture a droit à des explications qui la mettent en perspective dans la collection. Un livre-jeu destiné aux enfants de sept ans et plus a été édité pour les visites en famille. Un seul regret : lorsque nous sommes venus, les cartes postales de l’exposition n’étaient pas encore arrivées. Dommage, on serait bien repartis avec un petit souvenir de cette Passion post-impressionniste. Preuve, s’il en fallait encore une, que, même avec des moyens moindres, face à Goliath, David n’a décidément pas à rougir.

Infos pratiques : Exposition « Passion post-impressionniste », jusqu’au 15 février 2026, au musée Lambinet, 54, boulevard de la Reine, Versailles (78). Ouvert du mercredi au vendredi de 12 h à 19 h et le samedi et le dimanche de 10 h à 19 h. Tarifs : 7 € (plein tarif), 5 € (tarif réduit). Accès : gare de Versailles Rive Droite (ligne L). Plus d’infos et réservations sur versailles.fr