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24 heures à Cergy, voyage dans une ville nouvelle

L'Axe majeur, oeuvre monumentale à Cergy / © Steve Stillman pour Enlarge your Paris
L’Axe majeur, œuvre monumentale à Cergy / © Steve Stillman pour Enlarge your Paris

Construite sur un ancien village des bords de l'Oise, la ville nouvelle de Cergy offre l'occasion d'un étonnant voyage architectural à seulement 30 km du périph. Enlarge your Paris vous a préparé une boucle de 11 km depuis la gare de Cergy-Préfecture avec en prime une nuit dans une maison de campagne cachée dans la forêt.

Cergy, le village devenu grand

C’est l’histoire d’une métamorphose. Au début des années 1960, 3 000 âmes vivent sur le territoire de Cergy (Val-d’Oise). Mais de l’ancien village au bord de l’Oise ne subsistent aujourd’hui que quelques rares édifices historiques comme l’église Saint-Christophe ou le lavoir de la Rousselette. Tout a changé au tournant des années 1960, lorsque Cergy est choisie pour devenir l’une des villes nouvelles de l’agglomération parisienne, au même titre qu’Évry (Essonne) ou Saint-Quentin-en-Yvelines (Yvelines). Laboratoire pour les urbanistes des années 1970 et 1980, Cergy, qui compte aujourd’hui plus de 66 000 habitants, est un exemple fascinant de réflexion sur une nouvelle manière de vivre en périphérie des grandes villes. De la gare de Cergy-Préfecture jusqu’à l’œuvre monumentale de l’Axe majeur en passant par l’île de loisirs de Cergy-Pontoise, Enlarge your Paris vous invite à vous plonger dans l’histoire de la ville et vous a préparé une escapade de 24 heures.

Où loger ?

Cachée dans la forêt, à quelques mètres de l’entrée de l’île de loisirs de Cergy-Pontoise, la propriété familiale (depuis trois générations !) de Luc et Maryse Tricart est un trésor. Doté de cinq chambres, dont trois dans l’ancienne grange et deux dans des pavillons indépendants au cœur du parc, le Domaine de Mona allie le charme et l’élégance. L’hiver, vous profitez de la cheminée qui trône dans l’imposante salle à manger tandis que, l’été, vous allez chercher la fraîcheur en vous plongeant la piscine. Membre de l’association Axe majeur, Luc aura à cœur de vous raconter la longue histoire de ce projet architectural un peu fou né dans les années 1980 et vous donnera mille conseils et bonnes adresses pour profiter de votre séjour à Cergy. Au réveil, un délicieux petit-déjeuner vous attend avec pain et confitures maison, viennoiseries… À la fin, vous n’aurez qu’une idée en tête : revenir très vite !

Infos pratiques : le Domaine de Mona, 14, rue de Neuville, 95000 Cergy. Chambre double à partir de 100 €, petit-déjeuner compris. Tél. : 06 60 32 59 38 / 06 10 49 11 66. Accès : gare de Cergy-Préfecture (RER A / ligne L). Plus d’infos sur ledomainedemona.fr

Le Domaine de Mona à Cergy / @ Le Domaine de Mona
Le Domaine de Mona à Cergy / © Le Domaine de Mona
L'une des chambres du Domaine de Mona / @ Le Domaine de Mona
L’une des chambres du Domaine de Mona / © Le Domaine de Mona

Le parcours

Boucle de 11 km depuis la gare de Cergy-Préfecture (RER A, ligne L)

Étape 1 : le quartier de la préfecture, les prémices de la ville nouvelle

C’est ici que tout a commencé. En sortant de la gare Cergy-Préfecture, il suffit d’emprunter l’escalator qui grimpe jusqu’au parvis de la préfecture pour avoir un aperçu de la dalle, cœur du quartier de Cergy-Grand Centre. Premier terrain d’intervention de la mission d’aménagement de la ville nouvelle, la dalle fut conçue comme une préfiguration de ce que devait être la ville dans ses phases ultérieures de développement. Située à 6 mètres au-dessus du sol, elle est le centre névralgique de la ville et rassemble administrations, bureaux, commerces et activités de loisirs. Prenez le temps d’observer le bâtiment qui abrite la préfecture du Val-d’Oise. Construit en 1969 par Henri Bernard, architecte de la Maison de la radio à Paris, cet édifice en forme de pyramide inversée proposait à l’époque un rapport novateur à l’usager, en raison de sa transparence et de son accessibilité. À quelques mètres de là, ne manquez pas l’hôtel d’agglomération et la tour bleue des Cerclades, deux bâtiments emblématiques du quartier qui, au début des années 1970, faisaient la une de Paris Match dans le cadre d’un dossier intitulé « Cergy-Pontoise, naissance d’une ville ».

Le parvis de Cergy - Préfecture / @ Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
Le parvis de Cergy-Préfecture / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
La préfecture du Val-d'Oise à Cergy / @ Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
La préfecture du Val-d’Oise à Cergy / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
L'un des bâtiments de la dalle de Cergy / @ Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
L’un des bâtiments de la dalle de Cergy / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris

Étape 2 : la possibilité d’une architecture en îlots

En remontant le chemin Dupuis Vert en direction du boulevard du Port, on aperçoit l’architecture en îlots typique de la ville nouvelle des années 1970-80. Chaque îlot regroupe environ 600 logements regroupés autour d’une école, qui est située à moins de 500 mètres à pied de chaque habitation. Ils sont organisés autour d’une place centrale avec des commerces de proximité et une maison associative, cœur de la vie sociale du quartier. Après avoir passé le quartier de la Nouvelle Croix Petit, réhabilité à la fin des années 2000, vous arrivez au quartier du Ponceau, créé à la fin des années 1970 dans le cadre d’un concours d’architecture baptisé « Innovation ». Entièrement piéton et composé de plus de 50 % d’espaces verts, cet îlot se caractérise par des bâtiments en forme de cubes dotés de terrasses.

L'un des îlots de Cergy / @ Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
L’un des îlots de Cergy / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris

Étape 3 : au fil des saisons, le restaurant avec « la plus belle vue du monde »

On ne peut pas dire que l’avenue du Nord soit l’axe le plus agréable de Cergy. Elle cache toutefois une belle adresse pour un déjeuner de haute volée. Christophe (en cuisine) et Valérie (en salle) ont repris il y a cinq ans ce restaurant qu’ils ont rebaptisé Au fil des Saisons. Cette jolie maison, un peu en retrait de la route, bénéficie selon ses propriétaires de « la plus belle vue du monde ». Le panorama sur la forêt qu’offre la grande terrasse en pierre en fait, il est vrai, un lieu particulièrement agréable. Et le contenu de l’assiette n’a rien à envier au décor. La carte évolue au fil des saisons, et le menu du déjeuner change chaque semaine en mettant en avant des produits de la région. Parmi les spécialités du chef, des viandes maturées plusieurs mois sur place, un saumon fumé et un foie gras maison mais aussi et surtout un dessert inoubliable : le coulant au chocolat sous sa cloche. Tout ça à des prix vraiment pas parisiens, avec une formule entrée/plat/dessert à 22 €.

Infos pratiques : restaurant Au fil des Saisons, 17, allée des Acacias, entrée par l’avenue du Nord, Cergy (95). Fermé le lundi. Formule midi entrée/plat/dessert à 22 € (du mardi au vendredi) / formule menu de la saison entrée/plat/dessert à 42 €. Tél : 01 30 30 01 60. Accès : gare de Cergy-Préfecture (RER A / ligne L). Plus d’infos sur aufildes-saisons.fr

La terrasse du Fil des saisons / @ Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
La terrasse du resto Au fil des Saisons / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris

Étape 4 : l’Axe majeur, monumental

Il a servi de décor aux clips de Sébastien Tellier, Disiz la Peste, Lomepal, Maître Gims, mais aussi au défilé de Louis Vuitton en juin 2021. Œuvre monumentale, l’Axe majeur, signée du sculpteur israélien Dani Karavan, est un parcours urbain de 3 km imaginé au début des années 1980 par Michel Jaouën. Jalonné de jardins et de sculptures, il se compose de douze stations (la Tour belvédère, l’Esplanade de Paris, les douze Colonnes, la Passerelle, l’Île astronomique, la Pyramide…) dont la réalisation s’est étalée sur une trentaine d’années mais qui reste aujourd’hui encore inachevée. Mort en mai 2021, Dani Karavan n’a en effet pas eu le temps de finaliser la dernière station. Depuis la place des Colonnes Hubert-Renaud, filez toujours tout droit. Après avoir franchi les douze colonnes, vous découvrez un panorama époustouflant sur la passerelle et ses neuf portiques rouges avec au loin la boucle de l’Oise et les tours de la Défense. À la nuit tombée, un rayon laser projeté depuis la Tour belvédère traverse le parcours. Un spectacle saisissant.

L'Axe majeur / @ Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
L’Axe majeur / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
L'Axe majeur / @ Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
Les douze Colonnes / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
L'Axe majeur / @ Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
L’Oise / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris

Étape 5 : l’île de loisirs de Cergy-Pontoise, stade de verdure

Après avoir franchi la passerelle de l’Axe majeur, place à la nature ! Vous arrivez sur l’île de loisirs de Cergy-Pontoise et aurez le bonheur de longer ses étangs sauvages en arpentant ses sentiers forestiers. Poumon vert de l’agglomération, elle couvre une superficie de 250 hectares et comprend six étangs. Un paradis pour les sportifs et les familles qui peuvent profiter de sa longue plage de sable fin et pratiquer aussi bien le surf sur une vague artificielle que le ski nautique, l’accrobranche ou le rafting.

Infos pratiques : Île de loisirs de Cergy-Pontoise, rue des Étangs, Cergy (95). Ouvert toute l’année. Plus d’infos sur cergy-pontoise.iledeloisirs.fr

L'Axe majeur / @ Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
L’un des étangs de l’île de loisirs de Cergy-Pontoise / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris

Étape 6 : Cergy Village et Port-Cergy, deux époques deux ambiances

Avant de repartir, prenez le temps de déambuler dans les ruelles pittoresques de Cergy Village. Loin du béton de la dalle, on trouve encore ici de jolies maisons en pierre et des corps de ferme qui témoignent du passé de cet ancien village rural dont la culture de la vigne a été l’activité principale jusqu’à la fin du XIXe siècle. Admirez la façade de l’église Saint-Christophe et de l’ancienne mairie-école, faites un crochet par le lavoir de la Rousselette construit en 1870 et rejoignez le port de Cergy pour un changement de décor total. Première marina d’Île-de-France, ce port de plaisance entièrement artificiel a été conçu dans les années 1980 par François et Bernard Spoerry qui ont imaginé une architecture de village idéal. Avec ses faux clochers et ses tourelles à colombages, ses ardoises et ses toitures à l’ancienne, Port-Cergy fleure bon le pastiche mais offre un cadre inattendu pour prendre un café au bord de l’eau avant de reprendre le train du retour.

L'Oise à Port Cergy / @ Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
L’Oise à Port-Cergy / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
L'église Saint-Christophe / @ Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris
L’église Saint-Christophe / © Mélanie Rostagnat pour Enlarge your Paris

Trois questions à un local de l’étape : Michel Jaouën, architecte et urbaniste à l’origine de l’Axe majeur

Pourquoi le territoire de Cergy a-t-il été choisi pour bâtir l’une des villes nouvelles de l’agglomération parisienne ?

Michel Jaouën : Dans les années 1960, le général de Gaulle confie à Paul Delouvrier la mission de réorganiser l’Île-de-France en créant des villes nouvelles afin de désengorger Paris. Cinq territoires sont identifiés : Marne-la-Vallée, Sénart, Évry, Saint-Quentin-en-Yvelines et Cergy-Pontoise. Pour faciliter le démarrage des chantiers, les urbanistes de l’époque ont cherché à s’adosser à des communes existantes. Le territoire de Cergy-Pontoise avait l’avantage d’être déjà desservi par plusieurs voies ferrées et une déviation était en cours de construction. Mais, selon moi, l’attrait majeur a été la qualité exceptionnelle de ce site avec le caractère paysager remarquable offert par la boucle de l’Oise, bordée d’étangs et de coteaux. Les quartiers nouveaux ont été bâtis sur de vastes champs céréaliers mais tous les espaces boisés ont été préservés, ce qui reste encore aujourd’hui un atout majeur de l’agglomération.

Quelles sont les spécificités architecturales des villes nouvelles ?

Dans les années 1960, les urbanistes s’inscrivaient dans le mouvement de l’architecture moderne, qui a caractérisé tous les grands projets de l’époque, que ce soit à Londres, Naples ou aux Pays-Bas. L’objectif était de séparer l’automobile des piétons, ce qui a conduit à développer des quartiers construits sur dalles, comme le quartier de la préfecture à Cergy. Ces premiers quartiers avaient pour qualité première d’être de vastes espaces piétons tout en restant organisés autour de voies de circulation très larges pour les voitures. Ce type d’architecture a ensuite été remis en cause en raison de son incapacité à traiter correctement les relations entre les différents niveaux de la dalle, notamment les sous-sols qui sont devenus d’importants points de blocage.

Comment l’aménagement de Cergy a-t-il évolué par la suite ?

Dans les années 1980, les urbanistes se sont inscrits dans le courant de l’architecture dite post-moderne en se rapprochant de l’organisation de la ville traditionnelle. Cela visait à simplifier l’urbanisation de la ville, avec une moindre séparation entre le trafic automobile et les piétons pour ne pas générer de nouveaux sous-sols, en privilégiant des immeubles bas ne dépassant pas cinq étages et en mélangeant, au sein d’un même quartier, structures collectives et logements individuels. À Cergy, cette vision s’est concrétisée par la construction d’îlots de 600 logements maximum, ce qui correspondait à la capacité d’accueil d’une école. Chaque îlot a donc été aménagé autour d’un établissement scolaire et d’un lieu public de rassemblement afin de favoriser la sociabilité entre les nouveaux habitants. Après la dissolution de l’Établissement public d’aménagement de la ville nouvelle de Cergy en 2002, la communauté d’agglomération a repris la main et a privilégié, dans le quartier le plus récent de Cergy-le-Haut, des immeubles de logement de grande hauteur, ce que l’on avait cherché à éviter jusque-là.

Bonus

Trois films tournés à Cergy à voir avant, pendant ou après : L’ami de mon amie d’Éric Rohmer, Naissances des pieuvres de Céline Sciamma et J’ai aimé vivre là de Régis Sauder

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