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Plus « bêle » la vie à la ferme de Filbois dans le parc naturel du Gâtinais

L'éleveur Vincent Morisseau et son troupeau à la ferme de Filbois en Seine-et-Marne / © Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris
L’éleveur Vincent Morisseau et son troupeau à la ferme de Filbois en Seine-et-Marne / © Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris

Située dans le parc naturel du Gâtinais en Seine-et-Marne, la ferme de Filbois est une affaire de famille depuis plusieurs générations. Depuis 2006, elle abrite dans ses anciennes écuries un magasin de proximité qui permet d'acheter les produits de la ferme (notamment de la viande d'agneau de race île-de-france) ainsi que ceux d'autres agriculteurs et artisans locaux. Journaliste pour Enlarge your Paris, Joséphine Lebard est partie à la rencontre de celui qui perpétue la tradition familiale, Vincent Morisseau.

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Le givre a déposé sa dentelle sur les vastes champs de ce coin du Gâtinais. Au volant de sa voiture, Vincent Morisseau désigne quelques chevreuils qui s’égaillent à l’horizon. « Ici, on peut voir loin. Et on a de magnifiques couchers de soleil. Je me suis intéressé au sujet et, franchement, ceux d’ici sont les plus beaux que j’ai pu contempler. Tous les soirs, quand je vais voir mes brebis, j’y ai droit. »

Céréalier, Vincent est aussi éleveur, à la tête d’un cheptel de 400 brebis, et produit 2 500 poulets par an dans son exploitation, la ferme de Filbois située à Aufferville (Seine-et-Marne), à quelques kilomètres de Nemours. « Dans le secteur, il y avait traditionnellement beaucoup d’élevages de moutons, explique-t-il. Mais, dans les années 60-70, les bergers sont partis en retraite ou ont été tentés par des postes d’ouvriers, mieux payés, dans les usines qui ouvraient à proximité. En 1905 à Aufferville, il y avait 3 000 moutons. Aujourd’hui, il y en a 400. Ce sont les miens. »

Vincent représente la sixième génération d’agriculteurs dans sa famille. Son arrière-grand-mère a acheté la ferme après l’avoir longtemps louée. Si son grand-père a « fait » du mouton, sa mère a préféré se tourner vers le lapin car « le mouton, ça ne marchait plus ». Lui a fait le choix d’y revenir. Ses brebis sont des « île-de-france » : « Elles sont lourdes et donnent de gros agneaux. C’est vraiment « la » race des bouchers parisiens. » Pourquoi avoir choisi de renouer avec l’élevage de moutons ? La réponse tient en deux mots : vente directe.

« Le problème de la production agricole, c’est qu’elle ne peut pas fixer elle-même ses prix »

En 2006, la ferme de Filbois a ouvert, dans ses anciennes écuries, un magasin de proximité où sont proposés la viande de l’exploitation ainsi que les produits d’autres agriculteurs et artisans locaux. On y trouve la viande de porc d’un éleveur voisin mais aussi les confitures et les glaces de Nathalie Macker, implantée à Boutigny-sur-Essonne (Essonne), les coulis de fraises de la ferme des Moënes à Ury (Seine-et-Marne) ou encore les pâtes Graines au Vent fabriquées à Corbeilles-en-Gâtinais (Loiret). « En choisissant la vente directe, je me désolidarise des prix du marché, explique Vincent Morisseau. Car le problème de la production agricole, c’est qu’elle ne peut pas fixer elle-même ses prix mais est tributaire des distributeurs. Moi, hormis l’abattoir, je maîtrise toute la chaîne de production. » Il s’estime aussi plus compétitif : sans intermédiaire, il propose un filet de poulet ou un chapon moins cher de plusieurs euros au kilo que ceux trouvés en supermarché. En 2022, il a adjoint à la boutique un labo tout neuf et emploie désormais un boucher à temps plein ainsi qu’une vendeuse.

Au retour de la bergerie, à quelques minutes en voiture de la ferme, on croise le panneau à l’entrée de ville d’Aufferville retourné. Ce sont des agriculteurs en colère qui ont mené cette action symbolique, manifestant ainsi leur sentiment qu’on marche sur la tête. Vincent résume la situation : « La génération de mon grand-père avait pour mission de nourrir la France dans l’après-guerre. Nous, on se fait insulter via les réseaux sociaux. Notre statut est dévalorisé. » Pour lui, la culture et l’élevage sont les deux jambes sur lesquelles marche l’agriculture. « C’est la logique du « rien ne se perd, tout se transforme », explique-t-il. Je donne à mes moutons l’orge non calibrée que je produis et la pulpe des betteraves. Ils me donnent ensuite de l’engrais pour fertiliser mes champs. »

Si une pointe d’amertume émerge parfois de son discours, elle n’ensevelit pas son enthousiasme pour son métier. Pour lui, l’avenir de l’élevage passera par les mêmes changements que ceux qu’a connus le monde viticole. « Comme certains vignerons, je pense qu’à l’avenir il faut créer sa marque, établir son réseau, vendre soi-même ses produits. » Sur les champs du Gâtinais, la brume du matin a désormais laissé la place à un beau soleil d’hiver.

Infos pratiques : ferme de Filbois, famille Morisseau, 17, rue Grande, Aufferville (77). Vente directe à la ferme le jeudi de 14 h 30 à 18 h, le vendredi de 9 h 30 à midi et de 14 h 30 à 19 h, le samedi de 9 h 30 à 13 h. Il est également possible de réserver en ligne sur maboutiquefermiere.fr. Plus d’infos sur ferme-de-filbois.fr

En partenariat avec Interbev, association fondée en 1979 qui fédère les organisations nationales représentant la filière française de l’élevage et des viandes, ses entreprises et ses métiers : éleveurs, commerçants, bouchers… Interbev porte la voix des professionnels et valorise leur volonté de proposer aux consommateurs des produits sains, de qualité et issus d’un mode de production plus durable. Plus d’informations sur l’agriculture circulaire sur agriculture-circulaire.fr

L'éleveur Vincent Morisseau / © Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris
L’éleveur Vincent Morisseau / © Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris

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