Culture
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Allez acheter des Pépito et repartez avec une œuvre d’art dans votre cabas au Rosny Market de Montreuil

Le Rosny Market à Montreuil s'est mué récemment en supérette - galerie d'art / © Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris
Le Rosny Market à Montreuil s’est mué récemment en supérette-galerie d’art / © Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris

Au premier coup d'œil, c'est une supérette comme il y en a tant d'autres dans le Grand Paris. Pourtant, le Rosny Market à Montreuil se démarque nettement de ses consœurs puisqu'elle est devenue également une galerie sous l'impulsion du directeur artistique Olivier Wyart.

Dans le quartier des Murs à pêches à Montreuil (Seine-Saint-Denis), vous pourriez passer devant Rosny Market sans rien remarquer de notable. Après tout, c’est une supérette comme il en existe tant d’autres avec ses horaires à rallonge, ses bonbons à côté de la caisse et ses légumes qui attendent le chaland dans des cageots disposés sous l’auvent.

Sauf que, justement. Admettons que vous vous approchiez des cageots. Il se pourrait bien que vous entendiez une pomme de terre vous raconter son histoire. Et si, intrigué, vous vous décidiez à franchir le seuil de la boutique, vous pourriez bien être accueilli par le son d’applaudissements frénétiques. D’ailleurs, au-dessus de la porte que vous venez de passer, des rouleaux de papier-toilette flottent dans le vent. Ils ont chacun été soigneusement brodés de fleurs. Votre œil s’égare du côté de l’écran de vidéosurveillance ? Vous risquez de voir, dans un angle du magasin, un drôle de bonhomme escargot en train de faire son shopping…

« Une épicerie, c’est un lieu de socialisation, et l’art, ça fait parler les gens »

À l’initiative de ce mini-happening, on trouve le directeur artistique Olivier Wyart. Voisin de la supérette et propriétaire de ses murs, il a proposé à Mayuran Sotheeswaran, le gérant du commerce, de transformer Rosny Market en galerie d’art. Ou plutôt d’y intégrer discrètement des œuvres « pour qu’elles n’empêchent pas le lieu de fonctionner ». Mayuran Sotheeswaran s’est laissé convaincre : « Cela apporte de la visibilité à ma boutique, explique-t-il. Une épicerie, c’est un lieu de socialisation, et l’art, ça fait parler les gens. Et puis la culture, ça fait toujours plaisir à tout le monde ! »

28 artistes – « 1/3 de Montreuillois, 1/3 de Français et 1/3 d’internationaux », précise Olivier Wyart – ont donc proposé une pièce originale qui s’insère dans l’activité de Rosny Market. Comme les briques de lait en porcelaine de Limoges imaginées par Lou Dervieux qui côtoient ses condisciples en carton. Le vase Laddish dessiné par Jessica Chetrit pose majestueusement entre une bouteille de rosé et une autre de Muscador. Au milieu des conserves, on trouve de jolis pots renfermant des citrons conservés dans la vodka et tatoués comme des peaux par Milena Binotto. Ouvrez le grand congélateur et, reposant à côté des frites surgelées, vous trouverez des toiles de Yann Chevallier représentant des montagnes.

Les rayons du Rosny Market / © Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris
Les rayons du Rosny Market / © Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris

Des œuvres à la vente

Au gré de la déambulation naît une forme de trouble : est-ce que je regarde une œuvre d’art ou bien un produit de grande consommation ? Car, finalement, le petit garçon qui pose sur les pots de Dakatine semblerait presque jailli d’une photo de Martin Parr. Quant aux compositions photographiques réalisées avec l’aide d’une IA et dans lesquelles Mayuran Sotheeswaran met en scène ses produits, elles pourraient avoir leur place dans une galerie. « C’est vrai qu’il y a comme un vertige entre la réalité du magasin et les œuvres qui sont exposées », sourit Olivier Wyart. Et si un coup de cœur pour l’une d’entre elles vous saisit, cela tombe bien car elles sont proposées à la vente. « 25 % revient à Mayuran comme s’il était le galeriste », explique Olivier Wyart.

Mais tout n’est pas à emporter. Certaines œuvres ont vocation à demeurer sur place, participant à l’embellissement du magasin. Comme le store qui surplombe l’entrée, réalisé totalement en récupération par Aline Portalier et Julia Olpinska. Quant à la poignée de porte, il s’agit d’une branche de pêcher – on est dans le quartier des Murs à pêches ou on ne l’est pas – fondue dans du métal par Ciguë architecture. Le tapis d’accueil, signé Objets Communs, est constitué d’éclats de céramiques. Et le rideau de fer a été customisé par Olivier Wyart.

« Dans le quartier, raconte-t-il, on a beaucoup d’écoles, un foyer malien, mais aussi des gens du voyage. On est au croisement de plein de communautés. Et cette exposition est une invitation à faire un pas de côté ensemble. » Un pas plein de fantaisie que les clients et les curieux semblent sauter avec bonheur.

Infos pratiques : Rosny Market, 131, rue de Rosny, Montreuil (93). Ouvert tous les jours sauf le mercredi de 10 h à 23 h. Exposition permanente en accès libre. Accès : métro Mairie de Montreuil (ligne 9). Plus d’infos sur Instagram

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