Des viennoiseries sans beurre ? Et puis quoi encore ? On avait le doute en poussant la porte de La Mauvaise Herbe tellement on n'en peut plus des adresses qui « réinventent » les icônes de la boulange et de la pâtisserie pour le buzz. Et puis voilà, on avait tout faux. Maxime et Florence ont ouvert leur adresse avenue de Saint-Ouen, en hommage à Brassens et à l'idée de dissidence. En bouche, ça se traduit par des tartes au citron explosives, des pâtés aux champignons qui tromperaient des carnivores avertis, et des produits de saison. Bienvenue chez les révolutionnaires du feuilletage.

Florence Neveux et Maxime Raïmi, La Mauvaise Herbe – Crédit photo Cassandre Sung
La Mauvaise Herbe a bien pris racine, avenue de Saint-Ouen (17e). Tenue par Maxime Raïmi et Florence Neveux, cette boulangerie-pâtisserie (lui aux pains, elle aux douceurs) doit son nom à la chanson éponyme de Georges Brassens. « Brassens a joué un rôle dans notre rencontre », explique Maxime, à qui, par discrétion, on n’en a pas demandé plus (on n’est pas Voici). « Et puis, ajoute Florence, la chanson est une ode aux marginaux, elle draine l’idée de dissidence. Ça allait bien avec ce que nous voulions faire. » Car au 103 de l’avenue de Saint-Ouen se joue une révolution tranquille. Sous ses allures d’échoppe classique avec croissants dodus et chaussons replets en devanture, on ne soupçonnerait pas que La Mauvaise Herbe sème une graine rebelle dans le jardin de la boulangerie-pâtisserie traditionnelle. Car ici il n’y a pas que le nom qui est végétal. Tout l’est. Comprendre : dans les produits, vous ne trouverez trace ni d’œufs, ni de lait animal, ni de miel. Inutile de préciser que les sandwichs, eux, sont sans viande.
C’est via l’écologie que Florence, d’abord, a rencontré le véganisme. Consciente que, en termes de bilan carbone, la viande n’était pas la panacée, elle opte pour le végétarisme. « Et puis je me suis renseignée sur les modes de production de lait et des œufs et j’ai vu que c’était tout aussi dramatique sinon plus », explique celle qui a franchi le cap il y a une dizaine d’années. Maxime lui a emboîté le pas deux ans plus tard.
Forcément : une question de béotienne nous brûle les lèvres : n’est-ce pas galère de faire de la pâtisserie sans œufs et sans lait et sans certains chocolats ? Trouve-t-on des produits de substitution convaincants ? Côté pain et viennoiserie, Maxime a pu s’appuyer sur une margarine végétale. « Il a un peu fallu tâtonner pour que le feuilleté soit plaisant et beau, mais on y est, sourit-il. En pâtisserie, remplacer un produit A par un produit B ne marche pas à tous les coups. Mais Florence a trouvé les solutions. » Pour le chocolat par exemple : Valrhona a développé une gamme 100 % végétale et la jeune femme travaille aussi avec les créations de Nicolas Berger, torréfacteur et chocolatier qui propose des alliances cacao/avoine évoquant le chocolat au lait.

La hantise du fraisier de novembre
Et c’est vrai qu’en bouche c’est convaincant. Le dessert poire/noisette/Earl Grey d’abord, avec son sablé reconstitué noisette, son insert noisette/confit de poire recouvert d’une mousse au thé Earl Grey. Tout l’automne en un dessert… Le gâteau amande/fleur d’oranger n’aura pas eu une durée de vie très longue non plus. Quant à la tarte au citron, son acidité crépite en bouche, tonique. Tartelette cappuccino, chausson aux figues… prolongent l’ambiance automnale. Car La Mauvaise Herbe se la joue de saison. Pas de fraisier de novembre ici !
Il en est de même côté salé avec une belle focaccia au butternut, oignons rouges et lardons… végétaux, évidemment. Le sandwich au pâté ? Charnu et appétissant, de quoi tromper n’importe quel viandard. « C’est une terrine à base de champignons, de pignons de pin et de lentilles, avec évidemment un mélange d’épices, explique Florence. On a aussi du tofu fumé qui, visuellement, ressemble au gras qu’on trouve dans le pâté. Ce mélange permet de retrouver le goût umami de la viande. » Côté garniture, le couple respecte aussi la saisonnalité. « Il n’y a pas de tranches de tomates toute l’année dans nos sandwichs », poursuit Florence. En ce moment, c’est carottes râpées et chou rouge mariné.
Dans leur clientèle, Maxime et Florence estiment à 10 ou 15 % leur part de clientèle purement végane. Pour le reste, il y a des intolérants, des femmes enceintes et aussi… une bonne part de gens qui ne savent pas qu’ils franchissent la porte d’une boutique végétale. Maxime met en vente sa baguette bio à 1 euro, soucieux de « proposer des prix cohérents et abordables », et de demeurer une boutique de proximité dans ce quartier où clientèles populaire et gentrificatrice se côtoient. Dans la chanson à laquelle le magasin doit son nom, Brassens dit : « Et je me demande pourquoi, Bon Dieu / Ça vous dérange qu’on m’aime un peu ». Pour cette Mauvaise Herbe-là, la question ne se pose vraiment pas.
Infos pratiques : La Mauvaise Herbe, 103, avenue de Saint-Ouen, Paris (17e). Ouvert tous les jours sauf le jeudi de 7 h à 20 h. Accès : métro Guy Môquet (ligne 13). Plus d’infos sur Instagram


30 octobre 2025 - Paris
 
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                
                     
                
                    