Société
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Vivre dans un bidonville à Paris à l’heure du coronavirus

Le bidonville de Bobigny / © Bâtisseurs de cabanes
Un bidonville à Bobigny en 2019 / © Bâtisseurs de cabanes

Avec le confinement sanitaire, les Roms des bidonvilles de Paris et de la petite couronne ne peuvent plus travailler et ont perdu toutes leurs ressources. Olivier Leclercq, architecte parisien qui accompagne l'association Bâtisseurs de cabanes, propose de contribuer à une cagnotte en ligne ouverte par les habitants des camps de la Porte de La Villette afin de leur permettre d'acheter des biens de première nécessité.

Une initiative soutenue par Enlarge your Paris dans le cadre de la RTE (responsabilité territoriale des entreprises)

A la suite du confinement, les habitants de deux bidonvilles de la Porte de La Villette ont ouvert une cagnotte participative pour surmonter la crise en raison des changements survenus dans les dispositifs de solidarité…

Olivier Leclerc : Oui, il s’agit d’une collecte lancée par les habitants des bidonvilles du haut et du bas de la Porte de la Villette (19e), qui abritent environ 150 personnes dont 25 enfants dans une quarantaine de cabanes. Depuis le début du confinement sanitaire, ils ont perdu leurs maigres moyens de subsistance. Les Restaurants du Cœur, qui ont une antenne tout près du camp, arrivent encore à leur livrer des paniers repas. Mais la plupart des associations ne peuvent plus leur apporter leur aide, à cause des restrictions de circulation ou encore parce que de nombreux bénévoles âgés restent confinés. Une militante du Secours Catholique nous a envoyé la liste de ce  qui manque le plus. Il faut de toute urgence de l’huile, des pommes de terre, de la viande et des produits laitiers pour les enfants, des couches ainsi que des bonbonnes de gaz. Le plus simple est de donner de l’argent aux Roms pour qu’ils puissent acheter tout cela. D’où cette cagnotte, qui se termine le 29 mars, et dont le titre dit tout : « Au secours des habitants des bidonvilles Porte de La Villette ».

Y’a-t-il d’autres camps à Paris ou en proche banlieue en ce moment ? 

On trouve d’autres bidonvilles près du cimetière de Gentilly dans le 13e arrondissement, à Drancy et Saint-Ouen en Seine-Saint-Denis ainsi qu’à Cergy dans le Val-d’Oise. Au total, cela représente près de 370 personnes, dont plus d’une centaine d’enfants. Pour le moment, nous n’avons pas recensé de cas de coronavirus. Ce sont surtout les conditions d’isolement qui accentuent leur précarité. Mais il faut absolument éviter que la pandémie ne se transforme en catastrophe humanitaire en banlieue parisienne !  Le bidonville de La Villette devait être évacué la semaine dernière et les familles avec enfants devaient aller dans des hôtels. L’évacuation n’a pas eu lieu et les places d’hôtel ont disparu. Aujourd’hui, il est urgent de les aider et la cagnotte lancée par l’association des Bâtisseurs de cabanes permet de subvenir à leurs besoins vitaux tout en limitant le nombre de personnes qui se rendent sur place, parce que tout le monde, habitants des bidonvilles et bénévoles, doit respecter le confinement sanitaire. 

Au-delà de l’urgence liée au confinement, comment aider les habitants des bidonvilles ? Qu’espérez-vous voir évoluer dans la situation administrative mais aussi la vision sociale et médiatique des camps ?

Depuis des années, la politique publique consiste essentiellement à détruire les camps et à reloger les familles pour quelques jours dans des hôtels sociaux, avant qu’elles ne retournent dans la rue rejoindre un autre bidonville ou reconstruire des cabanes sur un nouveau terrain, jusqu’à l’expulsion suivante. Dans ce contexte, de nombreuses associations tentent d’apporteur leur aide aux habitants des camps : le Secours catholique de Paris et de Seine-Saint-Denis, Accueil coopération insertion des nouveaux arrivants (ACINA), Médecins du mondeASET93, le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD), Romparis, Actes & Cités, etc. Quant aux Bâtisseurs de cabanes, son but est d’améliorer le quotidien des bidonvilles avec des petites constructions comme un escalier, une porte, etc. Toutes ces associations se battent pour faire tampon entre les Roms et les forces de l’ordre,  faciliter la scolarisation des enfants, obtenir un suivi médical pour tous, une domiciliation administrative. C’est là un combat de fond, qu’il faut sans cesse reprendre. 

Infos pratiques : La cagnotte solidaire « Au secours des habitants des bidonvilles Porte de La Villette » est ouverte jusqu’au 28 mars

A lire : Enlarge your Paris lance la RTE pour soutenir les initiatives locales