Société
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Pour une vision partagée de la Seine à l’échelle de l’Île-de-France

Le vieux pont de Limay entre Limay et Mantes-la-Jolie / © Jérômine Derigny pour Enlarge your Paris
La Seine et le vieux pont de Limay entre Limay et Mantes-la-Jolie / © Jérômine Derigny pour Enlarge your Paris

Créée en 2018 par un collectif de Grand-Parisiens, l'association La Seine n'est pas à vendre appelle dans un manifeste à faire du fleuve un bien commun alors qu'il accueillera en 2024 la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques a annoncé Emmanuel Macron le 24 juillet.

Notre association, La Seine n’est pas à vendre, s’est donné comme objectif de contribuer à l’élaboration d’une vision respectueuse et dynamique du fleuve et de ses affluents, à Paris, dans la Métropole et l’ensemble de sa vallée. Elle s’est définie lors de sa création, en juin 2018, à la fois comme lanceur d’alerte, force de propositions, rassembleur d’idées et de projets. Constatant l’absence de vision politique sur le fleuve et son écosystème hydrique et paysager, au profit de projets d’urbanisme ponctuels dictés ces dernières années par les logiques à court terme d’investissement et de valorisation foncière, nous dénonçons le risque d’une dynamique de prédation qui profite de l’attractivité de la Seine pour aménager ses rives au détriment de toute réflexion sur l’écosystème, le grand paysage et la profondeur des rives, la mobilité et le fret fluvial. Hormis les notions de trames vertes et bleues – auxquelles il faudrait ajouter la trame blanche des couloirs de ventilation jusqu’ici oubliés -, la Seine et ses affluents, ainsi que les canaux, sont quasiment absents du projet métropolitain. Ils ne sont pris en compte que ville par ville, plus rarement à l’échelle d’un établissement public territorial.  

Il est vrai que la gouvernance du grand territoire métropolitain relève d’un millefeuille institutionnel peu lisible, entre Région, Métropole, Départements (dont Paris), Établissements publics territoriaux et communes dont 170 sont riveraines de la Seine en Île-de-France. Face à ce constat, nous appelons à construire d’urgence une vision partagée de la vallée de la Seine à l’échelle de la Région-Métropole avec l’ensemble des acteurs institutionnels concernés mais aussi, et surtout, avec les citoyens et les associations. L’enjeu est d’adopter des principes soutenables d’aménagement au bénéfice des habitants et non de la spéculation foncière, de préserver l’écosystème, de revaloriser les patrimoines matériels et immatériels et d’identifier les capacités de production et les ressources propres du territoire.

Pour atteindre ces objectifs, nous considérons indispensable de mobiliser les populations de l’ensemble des territoires concernés et leurs élus et d’être réceptifs à leurs capacités créatives. En conséquence, nous demandons que tous les projets envisagés en bordure de Seine respectent les principes suivants :

– aborder le territoire du fleuve à l’échelle de la Métropole, voire de l’ensemble de sa vallée, avec des projets de requalification écologique et paysagère dans les zones naturelles, des continuités paysagées, des requalifications d’infrastructures routières et des projets de renaturalisation dans les zones denses ;
– considérer l’écosystème fluvial comme un patrimoine inaliénable commun, prenant en compte le fleuve lui-même, son écrin végétal, ses rives et leur continuité, le cadre bâti de ses quais, les ouvertures et les respirations urbaines transversales ainsi que les perspectives ;
– lutter contre toutes les formes de pollution de l’air et de l’eau ainsi que la pollution lumineuse et sonore et réguler la circulation touristique et les activités privatives le long des berges ;
– développer un droit à la rive pour tous les citoyens avec la mise en place d’une démocratie délibérative vivante et d’un projet écologique et social du fleuve adapté à chaque contexte ;
– assurer une continuité des modes actifs de déplacement (vélo et marche) sur les deux rives des fleuves, affluents et canaux dans la Métropole, y compris dans ses zones portuaires.
– soutenir et encourager les pratiques sensibles et populaires, insuffler de l’imaginaire, valoriser le temps long du fleuve, répondre au désir de nature et d’eau, mais aussi encourager les modes informels d’appropriation du fleuve. En effet, nous contestons la légitimité de l’appropriation des rives du fleuve par les seuls acteurs économiques ou institutionnels ;
– refuser de dédier exclusivement le site de la Seine et le centre de Paris au tourisme de masse en multipliant les aménagements dignes d’un parc d’attraction ;
– réguler la navigation des marchandises et des passagers au profit d’une meilleure desserte pour les habitants et des circuits courts pour l’approvisionnement.
– améliorer la prévention et l’adaptation aux risques d’inondation et autres aléas naturels ou non – sécheresse, pluies et orages, pollution – qui concernent une importante portion de la population francilienne aujourd’hui mal informée ;
– pour l’ensemble de ces points, développer une solidarité de fait entre la ville-centre et les territoires en amont et en aval.

La récente reconquête piétonne d’une partie des berges parisiennes au profit des piétons et la perspective des JO 2024 ouvrent une nouvelle période de relations entre la Métropole et son fleuve, avec de nombreux projets pour le meilleur ou pour le pire. La Seine et ses affluents contribuent de façon essentielle à la transition écologique de nos territoires. Face à l’urgence climatique, le temps nous est compté. Ce manifeste pose un cadre et fait des propositions pour l’action. Nous appelons toutes celles et ceux qui se mobilisent déjà sur le sujet, développent une veille active, lancent des alertes ou agissent sur le terrain, ainsi que les acteurs institutionnels et les équipes municipales riveraines de la Seine et de ses affluents à contribuer à ce vaste chantier.

Infos pratiques : Plus d’infos sur laseinenestpasavendre.com

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