Société
|

« Le contact avec la nature en ville est un défi démocratique »

Le parc André Malraux et les tours Nuages à Nanterre / © Guilhem Vellut (Creative commons - Flickr)
Le parc André Malraux et les tours Nuages à Nanterre / © Guilhem Vellut (Creative commons – Flickr)

Fin avril, Jean-Noël Consalès, maître de conférences en aménagement du territoire, urbanisme et géographie à l'université d'Aix-Marseille, co-signait une tribune dans The Conversation sur l'importance de l'accès à la nature en ville. Alors que les parcs demeurent fermés en Île-de-France depuis le début du confinement, il plaide pour un changement de paradigme dans le dialogue ville-nature.

Pourquoi des parcs urbains sont ouverts à l’étranger, à l’instar de Central Park à New York, tandis qu’en Île-de-France ils demeurent fermés ?

Jean-Noël Consalès : Ce sont des choix politiques et techniques mais sur un plan plus réflexif, les fermetures de parcs posent surtout la question de la vivabilité de la ville, en particulier à Paris, l’une des villes les plus denses au monde. Nous pouvons nous demander pourquoi des centres commerciaux sont ouverts alors qu’ils favorisent une forte promiscuité tandis que les espaces verts sont toujours clos. La maire de Paris, Anne Hildago, ainsi que la CSMF, un syndicat de médecins libéraux, réclament la réouverture des parcs pour que les Parisiens puissent s’aérer après deux mois de confinement. La demande a été rejetée à maintes reprises par le gouvernement qui invoque des risques sanitaires.

Quel rôle associe-t-on à la nature en ville ? 

A Paris comme dans d’autres villes en France, la variable de vivabilité pendant le confinement était la possession d’un jardin ou d’un balcon. Aujourd’hui, en phase de déconfinement, nous pourrions nous attendre à ce que les besoins de nature soient pris en compte de la même manière que les besoins d’aller chez le coiffeur par exemple, or ce n’est pas le cas. J’imagine que le problème derrière cette fermeture est celui de la sécurité et des coûts inhérents à la surveillance, mais ça ne gomme en aucun cas notre besoin essentiel de contact avec la nature.

Selon Philippe Clergeau, professeur en écologie au Muséum national d’Histoire naturelle à Paris, le confinement a souligné une profonde envie de nature

Depuis la crise du Covid-19, les espaces naturels sont vus comme un besoin, auparavant sous-jacent mais désormais nettement exprimé. Le contact avec la nature en milieu urbain est une impérieuse nécessité à laquelle il faut répondre en pensant différemment l’évolution de la ville. C’est un défi démocratique car à l’annonce du confinement, 20% des Parisiens sont partis se réfugier à la campagne. Les autres sont restés captifs de la ville. Il faut donc pouvoir offrir à tous un rapport de proximité avec la nature. Nous devons pour cela changer paradigme. Il faut accepter d’être dans un rapport équilibré entre toutes les formes du vivant et non plus dans une domination de l’Homme. La nature doit également être envisagée comme un tout et non comme un simple décor de la ville.

En quoi le biorégionalisme prôné par l’urbaniste italien Alberto Magnaghi apparaît comme l’une des solutions ?

Le biorégionalisme remet en cause le découpage purement administratif de nos territoires pour s’intéresser à leur fonctionnement naturel. Néanmoins, rien ne sert de découper une région en fonction de ses ressources s’il n’y a pas d’abord un profond changement de pensée à l’égard de la nature.

Lire aussi : 70 ha plus grand que Central Park, le parc Georges Valbon autorisé à rouvir dans le 93