Société
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« Il y a urgence à sauvegarder les terres agricoles en région parisienne »

Visite dans une amap avec Abiosol / © Abiosol
Visite dans une amap avec Abiosol / © Abiosol

Depuis 2009, Abiosol accompagne tous ceux qui souhaitent se lancer en agriculture biologique comme nous l'explique Lucie Humbaire, chargée de mission émergence de projet. L'association est également engagée dans la préservation des terres agricoles en Île-de-France, un sujet qui sera au coeur de la prochaine conférence des Rencontres agricoles du Grand Paris le 27 février.

A quels besoins répondait la création d’Abiosol en 2009 ?

Lucie Humbaire : Il s’agissait d’accompagner les porteurs de projets désireux de faire de l’agriculture paysanne et biologique sur le territoire francilien. A l’origine d’Abiosol, on trouve quatre structures : le Groupement des agriculteurs biologiques d’Île-de-France (GAB), le réseau des AMAP en Île-de-France (Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne), l’association Terre de Liens Île-de-France et la coopérative Les Champs des Possibles. L’objectif est de fournir à ces nouveaux paysans les outils dont ils ont besoin et de leur transmettre les savoir-faire et les spécificités que requiert l’agriculture biologique. Les demandes depuis 2009 n’ont fait que croître. Il a donc fallu créer un poste dédié que j’occupe depuis un an et demi après avoir géré entre autres la ferme urbaine de La REcyclerie (18e).

En quoi consiste l’accompagnement d’Abiosol ?

Nous accompagnons les nouveaux paysans de la genèse de leur projet jusqu’après leur installation. La plupart du temps, il s’agit de personnes approchant de la quarantaine en situation de reconversion professionnelle et sans aucune expérience dans le milieu. En 2018, j’ai reçu près de 200 porteurs de projets. Dès la première réunion d’information collective, près de la moitié se sont désengagés car ils ne se sentaient pas prêts à transformer un projet personnel en  activité professionnelle. Nous proposons plusieurs formations et parcours qui permettent par exemple de tester la réalité du terrain. Nous organisons également régulièrement des apéros installation entre les bénéficiaires des formations. Les temps d’échange sont essentiels pour faire évoluer les réflexions de chacun. L’an dernier, Abiosol a accompagné  l’installation d’une vingtaine de personnes qui étaient suivies en moyenne depuis trois ans. 

On oppose souvent l’agriculture rurale à l’agriculture urbaine. Quelles convergences existent-ils entre ces deux approches ?

Il n’y a pas de concurrence entre l’agriculture urbaine et rurale. Elles se différencient par leurs modes de production, mais sont complémentaires par leurs objectifs. L’agriculture urbaine n’a pas du tout vocation à nourrir  la ville à elle seule et ne produira jamais de céréales ou de légumes racines. En revanche, elle me semble nécessaire pour impulser la transition vers une autre agriculture puisque les habitants voient ce qu’il est possible de faire au pied de chez eux.

Quelles sont les attentes d’Abiosol concernant l’évolution de la politique agricole française ?

Pour l’Île-de-France, les grands défis agricoles de demain sont la réintroduction de l’élevage, l’augmentation de la valeur ajoutée des fermes (diversification des ateliers), l’installation de lieux de transformation (abattoirs, légumeries…) et surtout l’augmentation du nombre d’exploitations en agriculture biologique. Pour relever ces défis, il faut travailler à la fois sur l’installation de nouveaux paysans et sur les transmissions de fermes. Il faut aussi faire en sorte que les formations et l’accompagnement soient accessibles à tous, y compris ceux et celles qui ne sont pas issus du monde agricole. Par ailleurs, nous sommes convaincus que le modèle agricole francilien ne pourra  changer en profondeur que si on associe les citoyens à la réflexion et aux actions menées sur le terrain. Au-delà des besoins individuels des Franciliens, la question se pose de l’approvisionnement bio et local de la restauration collective. Et pour assurer cette production, le nerf de la guerre demeure le foncier qui, dans la région, est soumis à une énorme pression. Endiguer l’urbanisation massive et sauvegarder les terres agricoles en région parisienne, voilà l’urgence !

Infos pratiques : Dans le cadre des Rencontres agricoles du Grand Paris, organisées jusqu’en juillet par Enlarge your Paris en partenariat avec la Métropole du Grand Paris, conférence « L’agriculture en ville bouscule-t-elle le monde agricole ? » mercredi 27 février de 14h30 à 17h au Salon de l’agriculture, 1 place de la Porte de Versailles, Paris (15e). Accès libre sur inscription sous réserve d’être muni d’un billet pour le Salon de l’agriculture. Infos et inscription sur Eventbrite

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