
C'est l'histoire d'une maison de maître menacée de destruction à Saint-Ouen et finalement sauvée par un couple amoureux des belles pierres... et des bons petits plats. Journaliste pour Enlarge your Paris, Joséphine Lebard en a poussé les portes.
En sortant du métro Mairie de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), il y a des signes qui ne trompent pas : trottoir de gauche, le bouillon ouvert par le chef Thierry Marx ; trottoir de droite, Meïda, la brasserie méditerranéenne lancée par Mohamed Cheikh, ancien vainqueur de Top Chef. À quelques encablures de là, on peut aussi compter avec les solides Le Ripailleur ou Bonne Aventure. C’est dire que, en termes de gastronomie, l’offre ne cesse de s’étoffer dans la cité audonienne. D’autant qu’un petit nouveau vient de se rajouter. Pour le trouver, il faut marcher quelques centaines de mètres en direction de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), tourner dans la rue du Landy et nous voilà face à une belle maison de maître à la porte vert bouteille. Bienvenue à l’hôtel Le Charmant, hôtel-bar-restaurant ouvert en février dernier par Anne Oury et Selim Mouhoubi.
Habitant le quartier depuis une décennie, le duo passait quotidiennement devant cette demeure inhabitée. « Or on avait déjà vu des maisons de ce type situées sur des terrains rachetés par les promoteurs et qui étaient ensuite détruites », se remémore Anne. Anne et Selim se lancent dans la bataille pour sauver le lieu et remportent la partie. Lui est entrepreneur, elle a fait toute sa carrière dans l’hôtellerie. Leur idée : ouvrir une maison de campagne en ville.
Ancien lieu de villégiature
On s’installe dans ce qu’on suppose avoir été le salon de la maison. Un bel espace peint en bleu ardoise avec moulures et une élégante fresque au plafond : un ciel azuréen parsemé de corbeilles de lilas et de clématites en trompe-l’œil. « Les anciens propriétaires possédaient des mines dans le Nord. Ici, c’était leur lieu de villégiature, un peu à l’écart de la capitale », raconte Anne. Elle a d’ailleurs pioché dans les photos de famille et les meubles trouvés dans le grenier de la maison pour aménager l’espace. L’ambiance est calme – nous sommes en plein pendant les vacances – et on patiente en laissant Charles Aznavour bercer nos oreilles. La playlist aussi joue la carte du vintage. Côté carte justement, les plats – ballottine de volaille fermière, risotto crémeux des sous-bois et jus corsé ; pavé de maigre nacré, légumes confits et beurre rouge… – tournent entre 22 et 28 €. « L’idée est vraiment de proposer une cuisine de tradition bourgeoise, un peu à l’image de celle que pouvaient justement déguster les anciens propriétaires », explique Anne.

Restaurant avec jardin
Avec ma complice, nous optons pour la formule déjeuner : une salade de quinoa et petits légumes (4 €) suivie d’un onglet de bœuf avec sa jardinière (17 €). La salade n’est pas révolutionnaire mais le dressage est travaillé, composant un dôme agréable à l’œil où le rose translucide du radis s’acoquine avec le rouge vif des poivrons. Le niveau monte avec le plat de résistance, notamment la jardinière vraiment délicieuse et qui rend hommage au printemps avec les pois gourmands judicieusement mariés aux navets et aux carottes. La portion n’est pourtant pas chiche mais voilà le genre de proposition simple et bonne dont on aurait volontiers repris.
Après le déjeuner, on s’esquive dans le hall pour contempler les superbes fresques qui évoquent Matisse réalisées par l’artiste Olivia de Bona : des femmes, peau cuivrée et chevelure rousse, semblent vouloir entraîner le visiteur dans une danse. Au-dessus de nos têtes se trouvent huit chambres de l’hôtel, en attendant douze autres prévues dans les anciennes écuries en cours de réhabilitation. Mais c’est une touche de vert qui attire notre attention : la maison compte en effet à l’arrière un jardin de 500 m2.
À l’époque des anciens résidents/propriétaires de mines, il s’étendait… jusqu’au quartier Pleyel et comptait des vignes ainsi qu’un champ d’asperges. Si l’espace s’est beaucoup réduit, les arbres centenaires qui s’y trouvent offrent toujours la même qualité d’ombre. Sachant qu’on peut venir ici boire un verre, déjeuner, dîner ou même juste prendre un café. « Tout le monde est bienvenu », assure Anne. Aux beaux jours, le jardin est prétexte à des barbecues à volonté. Charmante perspective, non ?
Infos pratiques : Hôtel Le Charmant, 53, rue du Landy, Saint-Ouen (93). Restaurant ouvert du mardi au samedi midi et soir. Plats entre 9 et 28 €. Accès : métro Mairie de Saint-Ouen (lignes 13 et 14). Tél. : 01 80 97 91 97. Plus d’infos sur hotel-lecharmant-saint-ouen.fr
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27 mai 2025 - Saint-Ouen