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Dernier cinéma associatif de Paris, La Clef organise des projections dès 6 h pour éviter l’expulsion

Menacé de fermeture, La Clef, dernier cinéma associatif à Paris, est occupé depuis 2019 par le collectif La Clef Revival / © La Clef Revival
Menacé de fermeture, La Clef, dernier cinéma associatif à Paris, est occupé depuis 2019 par le collectif La Clef Revival / © La Clef Revival

Pour éviter son expulsion, La Clef, dernier cinéma associatif de Paris, organise depuis le 24 janvier des séances dès six heures du matin et jusqu'au soir en faisant la part belle au cinéma d'auteur.

C’est le dernier cinéma associatif de Paris. Et il est sur la sellette. Fondée en 1973, La Clef est rachetée en 1981 par le comité d’entreprise de la Caisse d’Épargne d’Île-de-France. Lequel remet la salle en vente en 2018. C’est le groupe SOS, acteur de l’économie sociale et solidaire qui, en 2019, signe le rachat. Mais beaucoup voient d’un mauvais œil cette transaction, soupçonnant SOS de vouloir surtout faire une belle opération immobilière. Depuis, un collectif citoyen s’attache à faire vivre le lieu. Et la mobilisation s’est intensifiée depuis le 31 janvier dernier, date à laquelle le tribunal administratif a demandé qu’il soit mis fin à l’occupation du cinéma. « En deux ans et demi, on n’avait jamais reçu de papier du commissariat », souligne Héléna Delamarre, investie dans le collectif La Clef Revival, qui défend l’existence du lieu.

Car, au cœur du Quartier latin, La Clef ouvre des portes à bien des films auxquels les circuits plus classiques les ont fermées. « La programmation n’obéit pas aux lois du marché, explique Lino, également investi dans l’occupation du lieu. Elle se tourne vers un répertoire moins académique. Ici, le cinéma appartient à son public, à ses employés. Il en résulte une programmation plus décalée. Cette liberté permet de voir des œuvres qui sont quasi invisibles ailleurs [à l’image de Captive, film porno féministe présenté pour la première fois en France le 7 février dernier, Ndlr]. » Sarah, autre bénévole, renchérit : « La Clef fait vivre le cinéma d’auteur. Elle permet à ces films de se faire entendre. »

Un film avant d’aller bosser

Et en effet, depuis une semaine, La Clef hausse la voix. Chaque jour, pour éviter l’expulsion, plusieurs séances sont proposées. « Quand Rosalie Varda [la fille de Jacques Demy et Agnès Varda, Ndlr] nous dit qu’on peut venir chercher quand on veut les copies qu’on souhaite et qu’elle est là à six heures du matin pour présenter un film, ça fait chaud au cœur », note Héléna Delamarre. C’est un fait, les projections démarrent dès potron-minet et plusieurs ont lieu chaque jour sous l’égide de soutiens de choix : Claire Denis est venue parler de S’en fout la mort et Céline Sciamma de Naissance des pieuvres, son premier film. Le 4 février à 6 h, Les Demoiselles de Rochefort faisaient vibrer les spectateurs avant qu’ils ne partent au travail ou sur les bancs de la fac. « Les séances sont souvent pleines, se réjouit Héléna Delamarre, on remplit les deux salles de 119 et 62 places. » La programmation est aussi l’occasion de voir des raretés comme Go Fish de Rose Troche, œuvre pionnière du cinéma lesbien, ou des courts-métrages de jeunes cinéastes arméniens. Autant de façons d’affirmer, à l’instar du poster affiché dans le hall, que « On ne mettra pas La Clef sous la porte ».

Infos pratiques : cinéma La Clef, 34, rue Daubenton, Paris (5e). Séances à partir de 6 h du matin jusqu’au soir. Prix libre. Accès : métro Censier-Daubenton (ligne 7). Programmation à retrouver sur laclefrevival.com

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