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Une historienne et un paysagiste vous font faire le tour des jardins remarquables du Grand Paris

Le Jardin des Plantes à Paris / © Julien Chatelain (Creative commons - Flickr)
Le Jardin des Plantes à Paris / © Julien Chatelain (Creative commons – Flickr)

Depuis le début du confinement, l’historienne Chiara Santini et le paysagiste Michel Audouy de l'Ecole nationale supérieure de paysage de Versailles racontent chaque jour l'histoire d'un jardin sur Facebook. Voici cinq spécimens grand-parisiens.

Chiara Santini, historienne, et Michel Audouy, paysagiste, à l’Ecole nationale supérieure de paysage de Versailles

Le jardin du château de Vaux-le-Vicomte (Maincy / Seine-et-Marne)

Le jardin du château de Vaux-le-Vicomte, aménagé entre 1641 et 1661 à la demande du surintendant des finances de Louis XIV, Nicolas Fouquet, est le premier grand chantier d’André Le Nôtre (1613-1700) et probablement l’une de ses œuvres les plus accomplies. Car, à Vaux, il ne s’agit pas de redessiner ou mettre au goût du jour une réalisation préexistante mais d’inventer un site.

Conçu en même temps que le château, le dessin du jardin s’articule avec une vision globale du projet où, du détail au général, l’architecture dialogue avec les différentes entités paysagères (le jardin, le parc, la campagne). Par un traitement sophistiqué du relief et une maîtrise subtile des plans de vision, Le Nôtre magnifie la topographie et crée un ensemble dont la symétrie n’est qu’une apparence.

Dès qu’on franchit les grandes portes-fenêtres qui donnent accès à la terrasse, le jardin semble se métamorphoser sous nos pas, dans un mouvement continu. Encadrées par les volumes verticaux des bosquets, les perspectives s’allongent, fuient ; de nouveaux bassins apparaissent, disparaissent ; l’assiette des parterres baisse d’un côté et monte de l’autre ; un canal surgit soudainement, aménagé dans le lit de l’Anqueil, en contrebas d’un miroir d’eau dont les dimensions se dilatent au fur et à mesure qu’on s’y approche.

Et quand, après avoir monté la contre-pente gazonnée qui clôt la perspective jusqu’à la statue d’Hercule, on se tourne pour admirer le site, celui-ci a de nouveau changé d’apparence. Les plans superposés des terrasses et des parterres se sont transformés en un socle minéral sur lequel semble flotter, au milieu des jets d’eau, le château, à la fois objet et sujet de ce paysage total.

Infos pratiques : Vaux-le-Vicomte, Maincy (Seine-et-Marne). Ouvert de mars à novembre. Tarifs : 16,90€ (plein tarif), 14,90€ (6-17 ans), gratuit pour les moins de 6 ans. Plus d’infos sur vaux-le-vicomte.com. Fermé en ce moment

Les jardins du château de Vaux-le-Vicomte / © Laurent Bernier (Creative commons - Flickr)
Le jardin du château de Vaux-le-Vicomte / © Laurent Bernier (Creative commons – Flickr)

Le Jardin des Plantes (Paris 5e)

L’histoire du Jardin des Plantes de Paris commence au début du XVIIe siècle, quand Guy de La Brosse (1586-1641), médecin de Louis XIII, obtient du souverain l’établissement d’un jardin destiné à l’étude et à la culture des plantes médicinales, dans le faubourg Saint-Victor, non loin de la Seine.

Placé sous la houlette de scientifiques renommés, tels Joseph Pitton de Tournefort (1656-1708) ou Georges-Louis Leclerc de Buffon (1707-1788), le Jardin royal des plantes médicinales devient, au cours du XVIIIe siècle, l’un des hauts lieux européens des sciences botaniques et l’une des destinations privilégiées de la promenade des Parisiens. À l’intérieur de ses clôtures, les visiteurs peuvent en effet découvrir des spécimens de la majeure partie des plantes connues, ainsi que d’importantes collections d’histoire naturelle. En outre, sous la direction de Buffon, le jardin s’agrandit jusqu’à la Seine et s’enrichit d’une partie aménagée avec un dessin irrégulier.

En 1793, reconnaissant l’extraordinaire valeur scientifique de l’établissement – qui depuis sa création offre des cours publics – la Convention nationale décide de le conserver et le transforme en Muséum d’Histoire naturelle. Entre la fin du XVIIIe siècle et la première moitié du XXe, de nouveaux bâtiments et lieux d’exposition viennent alors agrémenter le site : une ménagerie, des galeries de minéralogie, géologie, paléontologie et botanique, ainsi que cinq serres monumentales qui au début des années 2000 ont fait l’objet d’une restauration complète.

Infos pratiques : Le Jardin des Plantes, 57 rue Cuvier, Paris (5e). Ouvert toute l’année. Accès : Métro Gare d’Austerlitz Lignes 5 et 10 / Gare d’Austerlitz RER C. Plus d’infos sur jardindesplantesdeparis.fr. Fermé en ce moment

L'une des serres du Jardin des Plantes à Paris / © Rog01 (Creative commons - Flickr)
L’une des serres du Jardin des Plantes à Paris / © Rog01 (Creative commons – Flickr)

Le Potager du Roi (Versailles / Yvelines)

Le potager du château de Versailles, réalisé à la demande de Louis XIV par l’architecte Jules Hardouin-Mansart (1646-1708) entre 1679 et 1683, a réuni depuis sa création la triple mission de lieu de production, d’expérimentation et d’enseignement. Comme l’explique dans son « Instruction pour les jardins fruitiers et potagers » (1690), Jean-Baptiste La Quintinie (1626-1688), premier directeur du Potager, le jardin était en effet consacré à la production pour la table royale, ainsi qu’à l’expérimentation de dizaines de variétés fruitières et légumières et à la formation de jardiniers spécialisés.

En lien avec cette tradition, dès la Révolution, le site a fait l’objet de plusieurs projets pédagogiques autour de l’enseignement agricole, jusqu’à l’ouverture, en 1874, de l’École nationale d’horticulture de Versailles, premier établissement français pour la formation d’horticulteurs et de paysagistes. Classé au titre des Monuments historiques en 1926, le Potager du Roi est placé sous la responsabilité de l’École nationale supérieure de paysage depuis 1995. Patrimoine historique, organisme vivant et jardin-école, le site de l’ancien jardin royal fait aujourd’hui l’objet d’un important projet de réhabilitation et valorisation conduit par l’école, en lien avec les ministères de l’Agriculture et de la Culture.

Infos pratiques : Le Potager du Roi, 10 rue du Maréchal-Joffre, Versailles (78). Ouvert toute l’année. Tarif : 5€ (plein tarif), gratuit pour les moins de 26 ans. Accès : Gare de Versailles château – Rive gauche RER C. Plus d’infos sur potager-du-roi.fr. Fermé en ce moment

Le Potager du Roi à Versailles / © Département des Yvelines (Creative commons - Flickr)
Le Potager du Roi à Versailles / © Département des Yvelines (Creative commons – Flickr)

Le Parc des Buttes-Chaumont (Paris 19e)

Conçu entre 1864 et 1867 sur le site d’une ancienne carrière, le parc des Buttes-Chaumont s’inscrit dans les grands travaux de transformation de Paris administrés par le préfet Haussmann sous le Second Empire. Le projet est le résultat d’un travail d’équipe. L’ingénieur Adolphe Alphand (1817-1891), directeur du service municipal des Promenades et Plantations, assure la maîtrise d’œuvre avec l’ingénieur Jean Darcel (1823-1906). L’architecte Gabriel Davioud (1824-1881) réalise le mobilier et les bâtiments, alors que les paysagistes Jean-Pierre Barillet-Deschamps (1824-1873) et Édouard André (1840-1911) conçoivent le dessin et composent la palette végétale.

Ce parc (25 ha), conçu comme un équipement public, dote le nord de la capitale d’un grand espace végétalisé, offrant aux piétons comme aux voitures de longs parcours de promenade, ainsi que des lieux de restauration, des belvédères et des bancs pour se poser et observer le paysage. S’appuyant sur le terrain chaotique et rocheux, Alphand et ses collaborateurs composent un paysage aux multiples paradoxes où performances technologiques (utilisation du béton, passage du chemin de fer, ponts et passerelles) et pittoresques (grotte, cascade, arbres rares, falaise) se confondent. Les Buttes-Chaumont deviennent ainsi une vitrine, presque grandeur nature, des grandes infrastructures territoriales qui, à cette époque, sont en train de transformer la France.

Infos pratiques : Parc des Buttes-Chaumont, 1 rue Botzaris, Paris (19e). Ouvert toute l’année. Accès : Métro Jaurès Lignes 2, 5, 7bis. Plus d’infos sur paris.fr. Fermé en ce moment

 

© Corinne Moncelli (Creative commons - Flickr)
Le parc des Buttes-Chaumont à Paris / © Corinne Moncelli (Creative commons – Flickr)

Le nouveau parc zoologique de Paris (bois de Vincennes à Paris / 12e)

Inauguré en 1934, à la suite de l’exposition coloniale de 1931, le Zoo de Vincennes, premier zoo de cette ampleur ouvert en France, s’était dégradé au fil des années, pour devenir exclusivement minéral. Le Muséum national d’Histoire naturelle décide d’une restauration complète de 2008 à 2014 confiée, après concours, à l’Agence Jacqueline Osty. Il s’agit de donner plus de confort aux animaux et de les présenter dans un cadre qui rappelle les milieux naturels dont ils sont issus.

Paysagistes et techniciens du Muséum vont travailler de concert pour définir, enclos par enclos, la palette végétale adaptée et surtout le type de clôture. Les concepteurs rivalisent d’ingéniosité pour décliner, sous des formes très variées, le principe du saut de loup – fossés et noues plantés ou avec de l’eau, zones rendues infranchissables par la pose de certains matériaux – autant de stratagèmes pour protéger, sans fermer les vues.

Les vues, d’un enclos à l’autre, à l’échelle du parc, et les nouvelles échappées d’arrière-plans sur le Bois de Vincennes, permettent d’articuler les différentes séquences paysagères – sous-bois sombre, savane, « plaine sahélienne », paysage chaotique du grand rocher (conçu en 1933 par Charles Letrosne) – et de donner l’illusion que les animaux évoluent librement dans la nature.

Infos pratiques : Zoo de Paris, avenue Daumesnil, Paris (12e). Ouvert toute l’année. Tarifs : 20€ (plein tarif), 17€ (3 à 12 ans), gratuit pour les moins de 3 ans. Plus d’infos sur parczoologiquedeparis.fr. Fermé en ce moment

La série « Un jour, Un jardin » de l’historienne Chiara Santini et du paysagiste Michel Audouy est à suivre sur la page Facebook de l’Ecole nationale supérieure de paysage de Versailles

Zoo de Vincennes / © MNHN - F.G. Grandin
Zoo de Paris dans le bois de Vincennes / © MNHN – F.G. Grandin

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