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À Montreuil, un bar queer pour célébrer toutes les minorités

Hélène Carreira et Andréa Bellemere-Laussat, les fondatrices du MontVenus, bar queer à Montreuil / Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris

Il a ouvert le 16 février dernier. MontVenus est un bar à cocktails queer tenu par deux filles extras, Hélène et Andréa. Si vous vous retrouvez dans les valeurs d'inclusivité défendues par le lieu, vous êtes tous les bienVenus !

À Montreuil (Seine-Saint-Denis), à deux pas de la Marbrerie et de la ressourcerie Neptune, on trouve désormais le MontVenus. Un tropisme particulier pour la mythologie sur le boulevard Paul Vaillant-Couturier ? MontVenus fait en fait surtout référence à l’un des petits noms désignant le pubis féminin. Car le lieu se veut un bar à cocktails « queer, féministe et engagé ». Aux manettes : Hélène Carreira et Andréa Bellemere-Laussat, deux anciennes du Rosa Bonheur sur Seine, épaulées, pour les tapas, par Mathilde, la sœur d’Hélène.

Communauté bienveillante et espace safe

Mais au fait, c’est quoi, exactement, un bar queer ? « L’idée, explique Andréa, est d’afficher que ce bar est fait et pensé par deux lesbiennes. Queer, c’est tout ce qui n’est pas le mâle hétérosexuel cis blanc de plus de 50 ans» Hélène complète le propos : « On veut accueillir ici les personnes qui ont été exclues depuis trop longtemps de nombreux lieux. Cela ne veut pas dire qu’elles étaient forcément recalées à l’entrée, mais qu’elles pouvaient subir des microagressions, type regards déplacés ou remarques… » Du coup, on s’interroge : en tant que femme cis blanche et hétéro, peut-on franchir la porte du MontVenus ? Et être accompagnée de son conjoint ? Les deux jeunes femmes acquiescent : « À partir du moment où vous adhérez aux valeurs de notre charte, bien sûr ! » Le but est de constituer une communauté bienveillante où toutes les minorités se sentent dans un espace safe.

BienVenus au MontVenus ! / Joséphine Lebard pour Enlarge Your Paris

Et tant mieux car on serait désolée de manquer un lieu joyeusement inclusif aux cocktails canon. Tel le Kimi, composé de whisky infusé à l’earl grey, clémentine, sirop de miel, angostura bitter et oléo saccharum, le tout fumé à l’écorce d’agrumes. Ou encore le Carminda, à base de rhum infusé au poivre noir de Madagascar, jus de poire caramélisé, jus de citron frais, bénédictine, amaretto. « En hiver, on propose six cocktails signature et neuf en été », précise Hélène. Les cocktails se déclinent d’ailleurs en version désalcoolisée et on peut aussi profiter d’une sélection de vins, bières ou softs. Avec une préoccupation : miser sur le local. Les fruits et légumes viennent de l’épicerie Dangla à Romainville (Seine-Saint-Denis), le café est torréfié à Montreuil, la bière est aussi brassée sur la commune. « La dimension écolo va de pair avec le féminisme », explique Andréa.

« Ouvrir un bar queer en banlieue, c’est ne plus se cacher derrière Paris »

Quand on demande aux deux jeunes femmes ce que signifie ouvrir un bar queer en banlieue, la réponse fuse. Hélène évoque son adolescence à Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis) : « Il fallait que j’aille à Paris pour trouver des bars lesbiens. » Et revendique la dimension militante du projet : « Ouvrir un bar queer en banlieue, c’est aussi ne plus se cacher derrière Paris ! Moi, je suis banlieusarde, j’y suis, j’y reste. Si tous les LGBT de banlieue s’exportent à Paris, comment dire que notre communauté existe au-delà du périphérique ? » Hélène et Andréa insistent aussi sur les moyens que mobilisent les sorties à Paris quand on vient de banlieue : non seulement les taxis ou VTC quand le dernier métro est passé et qu’on n’a pas forcément envie de prendre un Noctilien. Mais aussi les tarifs pratiqués : « Le milieu de la mixologie s’est énormément gentrifié. Or, un cocktail, ça peut être simple sans marger par quatre ou par cinq sur les ingrédients utilisés », rappelle Andréa. Au MontVenus, les cocktails sont à 12 €. « On est transparentes, poursuit Hélène. On peut sourcer tous nos produits, dire pourquoi nos cocktails sont à ce tarif, pourquoi on doit gagner de l’argent sur ce que boit le client… »

Ouvert le 16 février dernier, le MontVenus a déjà conquis une clientèle qui vient profiter de sa salle aux jolies tables en bois et aux murs blanc et lilas (la couleur des lesbiennes). Mais aussi profiter d’une seconde pièce, tout aussi cosy, pour feuilleter les ouvrages de la « queerothèque », alimentée de livres fournis par des membres de la rédaction du magazine Têtu. Le 4 avril prochain s’y tiendra une première rencontre littéraire autour du livre de Christelle Bakima Poundza, Corps noirs. Hélène et Andréa promettent d’autres événements à venir. Et tandis qu’on s’éloigne sous une pluie fine arrosant Montreuil, on jette un regard d’envie sur la terrasse qui promet de belles soirées résolument inclusives. 

Infos pratiques : Le Mont Venus, 16, boulevard Paul Vaillant-Couturier, Montreuil (93). Ouvert du mercredi au samedi de 15 h à minuit et le dimanche de 11 h à 19 h. Accès : métro Mairie de Montreuil (ligne 9). Plus d’infos sur Instagram