Société
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« Après le confinement, il faudra continuer à s’entraider »

Connue pour son action dans le nord-est parisien, l'association des Poussières d'Aubervilliers a ouvert une cuisine solidaire dans ses locaux pour venir en aide au personnel soignant et aux habitants des quartiers populaires de Seine-Saint-Denis.

Des bénévoles de l'association Les Poussières, à Aubervilliers / © Les Poussières
Des bénévoles de l’association Les Poussières, à Aubervilliers / © Les Poussières

Pour soutenir l’action des Poussières d’Aubervilliers et financer leur cuisine solidaire pendant la durée du confinement, vous pouvez participer à la cagnotte en ligne sur HelloAsso

Une initiative soutenue par Enlarge your Paris dans le cadre de la RTE (responsabilité territoriale des entreprises)

Pourquoi avoir créé une cuisine solidaire ? 
 
Les Poussières : Au début de la pandémie, nous avons relayé et soutenu un certain nombre d’initiatives sur notre territoire, souvent d’ailleurs en nous y engageant à titre personnel. Mais avec la prolongation du confinement et face aux très nombreux besoins, nous avons décidé de mettre en place une cuisine solidaire, avec l’aide des chefs professionnels de notre réseau et de nombreux habitants. Notre objectif était de participer à l’effort collectif en faveur du personnel soignant et de livrer les foyers en difficulté à Aubervilliers et dans les alentours. Nous cuisinons essentiellement des plats végétariens halal. La distribution est faite par des bénévoles, en voiture mais aussi à vélo grâce à l’achat récent de remorques par une association avec qui nous travaillons.
 
Vous livrez désormais chaque jour des centaines de repas. Comment trouvez-vous toute la nourriture ? 
 
Grâce au réseau de récupération alimentaire des associations Disco Soupe et Amélior, nous avons un accès régulier à des invendus de supermarchés. Nous avons également ouvert une cagnotte qui nous permet d’acheter un stock tampon, car les récupérations sont toujours aléatoires. Nous pouvons recevoir un jour 150 poulets et trente ananas, et repartir le lendemain avec trois carottes. Or dans tous les cas de figure, il faut livrer ceux qui en ont besoin. Nous nous adaptons aussi aux habitudes des destinataires de notre cuisine. Par exemple, nous venons de décider de faire moins de plats tout prêts et de privilégier les paniers de denrées à cuisiner, notamment à l’approche du Ramadan qui est une période où la préparation des repas, même en comité restreint, est très importante. Certaines personnes en foyers ou dans les squats préfèrent aussi recevoir des denrées à cuisiner plutôt que des repas préparés. Nous devons être attentifs à ces préférences.
 
 
D’autres associations et structures viennent en aide aux habitants, comme les cuisiniers du squat du Landy Sauvage et ceux de Solidarité Migrants Wilson à La Plaine-Saint-Denis, ou encore les biffins d’Amélior du côté de Montreuil et de Bagnolet. Comment vous répartissez-vous les rôles ?
 
Nous travaillons constamment en collaboration avec les autres structures du territoire, ce qui permet de ne pas faire doublon et même de mutualiser nos ressources et nos contacts. Ce qui se passe avec le confinement est un nouvel exemple de la force de l’esprit collectif que l’on peut retrouver en Seine-Saint-Denis. Mais si pour nous cette cuisine solidaire est une action d’urgence ponctuelle, pour d’autres associations il s’agit d’un travail quotidien au long cours. La force, le courage et la persévérance des bénévoles de Solidarité Migrants Wilson sont incroyables. Il y a également les initiatives des habitants, moins visibles, qui œuvrent régulièrement mais de façon discrète. Dans le contexte de confinement, le bouche-à-oreille permet de savoir qui a besoin d’aide, y compris parmi ceux qui ne sont habituellement pas dans la nécessité. Nous sommes aussi en lien avec les services sociaux, les élus et les organismes HLM pour répondre au mieux aux besoins d’un maximum d’habitants. 
Une bénévole de l'association Les Poussières / © Les Poussières
Une bénévole de l’association Les Poussières / © Les Poussières
 
 
Il y a déjà plusieurs jours, des organisations caritatives ont déploré le retour de la faim dans les quartiers populaires et dans certaines zones rurales, en raison de la fermeture des écoles et de la fin de la « débrouille » (glanage, marchés alimentaires bon marché, et parfois petits trafics). Cette situation exceptionnelle dévoile une urgence sociale ordinaire, celle de familles qui en temps normal sont sur le fil… 
 
Tout à fait, cette période dévoile une triste réalité, qui était réelle avant le confinement. Il est temps de prendre en compte concrètement les derniers mouvements sociaux qui ne cessent d’alerter sur les risques de la politique actuelle. Parfois, on se croirait dans un roman de Jack London et ça fait peur. 
 
Au-delà de la situation d’urgence que nous vivons actuellement, que faut-il pour ces territoires ? 
 
Il faudrait plus de considération pour tous les citoyens et toutes les personnes vivant, ou survivant, dans nos villes. Il faudrait bien sûr  également plus de moyens  financiers. Il est toujours affligeant d’entendre qu’il faut partager les miettes équitablement parce que l’Etat baisse ses dotations mais que les besoins augmentent. Il faut un gouvernement qui veuille réellement pallier à toutes ces inégalités. 
 
Que peut-on faire pour vous aider ?
 
Il ne faut pas que cette culture de l’entraide s’arrête à la fin du confinement. Il faudra se rappeler que cette bienveillance est bénéfique à tous. 
 
Infos pratiques : Pour soutenir l’action des Poussières d’Aubervilliers et financer leur cuisine solidaire pendant la durée du confinement, vous pouvez participer à la cagnotte en ligne sur HelloAsso