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La pizza au bon goût de là-bas

La «Nonna», c’est la mémé en italien. Et promis, vu les pizzas que celle-ci vous concocte à Malakoff, vous n’aurez pas franchement envie de la pousser dans les orties…

Pizza della nonna à Malakoff / DR

 

Ne dites jamais à Mario et Cosimo que la pizza n’est qu’une alternative aux frigos vides du dimanche soir. Hableurs, champions de la parlotte avec les mains, ces deux frères pourraient presque constituer une publicité vivante pour l’office du tourisme de Sicile, leur île natale. Mais la qualité de leur pizza les préserve du simple rôle d’homme-panini. Il y avait l’arte povera, on pourrait dire que les frangins revendiquent la « pizza povera ». Pour la fioriture et les affèteries, pas la peine de franchir la porte de la « Pizza della Nonna ». Ici, on promeut une pâte fine, une sauce tomate goûteuse, une mozzarella crémeuse…  et pas d’abondance de garniture pour faire la part belle aux basiques de la recette. « Nous sommes une poignée à Paris à concocter ce genre de pizzas et on se conseille les uns les autres pour toujours garder un haut niveau d’exigence » explique avec flamme – et un brin de mystère – Mario le perfectionniste. Qui refusera, en mode Da Vinci Code, de dévoiler comment il a appris à faire des pizzas.

Comme dans un film de Dino Risi

Une chose est sûre, l’office du tourisme serait content : ici, on se sent propulsé dans une comédie de Dino Risi. Obsédé par la qualité de sa pâte, Mario ne passe pas 10 minutes sans  la commenter. La sonnerie du téléphone ne cesse de les rappeler à l’ordre, elle attendra. Le duo se lance dans une dissertation enjouée sur leur enfance passée à parler sicilien en Allemagne, ponctuée par le salut d’un taxi depuis sa voiture qui reviendra chercher sa pizza après sa course, et une visite courtoise de la coiffeuse voisine. 

 

Pizza della nonna à Malakoff / DR

 

« AUCUNE envie de faire une Capricciosa… »

Et au milieu de cette effervescence, les aubergines grillées continuent à mariner doucement dans l’huile d’olive ; Cosimo goûte sa sauce tomate pour y ajouter quelques herbes aromatiques ; la roquette prend ses aises, conservée comme un petit trésor fragile ; et le fier parmesan rappelle aux amateurs de supermarchés que ce fromage est à l’origine une énorme meule, non de la poudre en sachet stérile.

D’ailleurs rien ne sert de se ruer sur le menu plastifié, mieux vaut interroger Mario sur ce qu’il a envie de concocter, selon ses arrivages… et son humeur. « Demandez moi ce que vous voulez ce soir mais je n’ai aucune envie de faire une capricciosa » peut-il lâcher sans retenue. On notera tout de même l’excellence de la pizza parmigiana – aubergines grillés et copeaux de parmesan – ou le succès fou de la campione – bœuf haché et oeuf.

Une pizza et la force est en toi…

Et Cosimo ? Anciennement chef d’une trattoria parisienne branchée, il a préféré à l’ébullition parisienne ce minuscule commerce au delà du périph’ tenu en famille. Il y concocte ainsi tous les mercredis – « mais rien n’est figé » – quelques classiques aux saveurs délicates : lasagnes de légumes grillés où aubergines, courgettes et oignon se font un plan à trois, pâtes aux fruits de mer achetés le matin même au marché et ses célèbres arancinis, les boules de riz farcies… « Personne ne nous a appris la cuisine mais notre grand-mère de Sicile nous a transmis le goût des bonnes choses » commente-t-il avec simplicité. La preuve que la (vraie) pizza et les pâtes ça conserve : la fameuse « nonna » vient de fêter ses 99 ans.