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La promenade des aqueducs, de Paris à Arcueil

L'aqueduc Médicis à Arcueil / © Steve Stillman pour Enlarge your Paris
L’aqueduc Médicis à Arcueil / © Steve Stillman pour Enlarge your Paris

Entre le jardin du Luxembourg et Arcueil serpentent non pas un mais trois aqueducs construits entre l'époque gallo-romaine et le Second Empire. Largement enterrés à Paris, ces ouvrages se laissent de temps en temps entr’apercevoir et servent de prétexte à une balade de 8 km de la gare du Luxembourg à celle d'Arcueil-Cachan sur le RER B.

Les autres « Randos du Grand Paris » sont à retrouver ici

Promenade le long des aqueducs parisiens, de la gare du Luxembourg à Paris (RER B) à la gare d’Arcueil-Cachan (RER B) / Durée : 2h30 / Distance : 8 km / Chemins en terre ou gravillonnés (10%) et trottoirs (90%)

Cette balade a été inspirée par une Reine de France d’origine italienne, Marie de Médicis. Femme puis veuve de Henri IV, elle souhaitait orner son Palais du Luxembourg à Paris d’un jardin agrémenté de fontaines et de bassins. Mais à l’époque, la capitale manquait d’eau potable et parfois même d’eau tout court. La Seine était plus ou moins propre et souvent à sec, et les puits parisiens souillés par les « fosses d’aisance ». La reine fit alors détourner l’eau d’une petite rivière au sud de Paris, le Rungis, et ordonna la construction d’un aqueduc d’une dizaine de kilomètres pour la rediriger aux portes de Paris, à travers l’actuel 14e arrondissement.

A l’occasion de ces travaux, on découvrit les restes de l’ancien aqueduc de Lutèce, qui à l’époque gallo-romaine approvisionnait les thermes de Cluny – aujourd’hui Musée national du Moyen Âge (5e). Comme l’époque était férue d’antiquités, on ne détruisit par ces belles ruines, que l’on pourra entr’apercevoir à deux occasions lors de cette promenade qui propose de remonter le fil du temps, et de l’eau. Et si l’aqueduc de Marie de Médicis est toujours en activité, c’est un troisième ouvrage, l’aqueduc de Belgrand, construit au XIXe siècle à la demande d’Haussmann et de Napoléon III, qui fait désormais couler l’eau aux robinets des Parisiens. 

Le parcours suit le tracé des aqueducs – l’antique, le royal et l’impérial – et forme une balade de 8 km qui vous mènera du le Jardin du Luxembourg (6e) jusqu’aux coteaux d’Arcueil (Val-de-Marne) où les trois aqueducs, sortant enfin de terre, forment un beau paysage encore trop méconnu. Vous serez alors à deux pas de la gare RER du retour.

Infos pratiques : Le parcours intégral est à retrouver gratuitement sur openrunner.com. Vous pouvez aussi télécharger le parcours en format GPX ou KML afin de le lire sur votre téléphone portable ou appareil GPS. Il vous faut au préalable avoir chargé une application (gratuite) permettant de lire ces fichiers, comme Open Runner (Google Play et App Store), Google Earth (Google Play  et App Store) ou GPX  Viewer (Google Play).

Les 7 étapes du parcours

1/ Le jardin de l’Observatoire (6e)

Au départ depuis la gare du Luxembourg, prenez la direction de la rue Auguste Comte, en longeant les serres du jardin. Parvenu devant les grilles du jardin, jetez un œil au jet d’eau du grand bassin situé devant le palais. C’est pour fournir en eau le palais du Luxembourg que Marie de Médicis fit construire l’aqueduc dont vous allez maintenant suivre le tracé. Tournez le dos au jardin et entrez dans le petit parc qui se trouve devant vous. Cette allée de verdure, que les habitants du quartier appellent « Le Petit Luco »,  et qui semble un prolongement tout naturel du « grand » Luxembourg, a en réalité été créé assez récemment, en 1867, à la place d’un couvent de moines chartreux détruit à la Révolution.

En prenant la direction du Sud, on longe à main droite une annexe de l’Ecole nationale d’administration, au style architectural néo-mauresque (2, avenue de l’Observatoire). Il s’agit de l’ancienne Ecole coloniale, où était formés les administrateurs des colonies françaises. On longe ensuite les galeries de l’Ecole de pharmacie (4, avenue de l’Observatoire) avant de découvrir, au coin de la rue des Chartreux, un étonnant bâtiment de briques rouges, lui aussi de style colonial : c’est l’Institut d’Art et d’Archéologie. Enfin, à l’extrémité du jardin se trouve la superbe fontaine des Quatre-Parties-du-Monde ou encore Fontaine Carpeaux, du nom de l’un de ses sculpteurs, très réputé sous le Troisième Empire. 

2/ L’observatoire de Paris et le pavillon des Fontainiers (14e)

Traversez le boulevard du Montparnasse devant la gare RER de Port-Royal et prenez la petite avenue de l’Observatoire. A son extrémité se trouve l’observatoire de Paris, créé en 1667 à la demande de Louis XIV. C’est dans ce beau bâtiment baroque que prirent leur essor en France les sciences de la cartographie et de la météorologie, sous la direction d’une dynastie de cartographes italiens, les Cassini. C’est le plus ancien observatoire du monde toujours en fonctionnement, et le méridien de Paris – malheureux rival du méridien anglais de Greenwich – passe en son milieu. 

Lorsque vous regardez le bâtiment, depuis l’avenue de l’Observatoire, avec le Jardin du Luxembourg et la gare RER de Port-Royal dans votre dos, pivotez légèrement à droite. Vous apercevrez le dernier étage et le toit du pavillon des Fontainiers, construit en 1619 et où habitait le « fontainier du Roi ». L’eau de l’aqueduc de Marie de Médicis arrivait dans ses sous-sols, où elle était répartie dans trois bassins : le bassin des Carmélites (30% des eaux) alimentait les monastères du quartier ; le bassin du Roi (40 % des eaux) approvisionnait le palais et le jardin du Luxembourg ; le bassin de la Ville (30%) alimentait des fontaines publiques de la Rive Gauche jusqu’à l’île de la Cité, grâce à un tuyau passant le long du Pont-Neuf. Cette installation fut abandonnée avec la construction de l’aqueduc de la Vanne par Belgrand, sous Napoléon III.

3/ L’ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul et les restes de la friche des Grands Voisins (14e)

Prenez ensuite la petite rue Cassini pour rejoindre l’avenue Denfert-Rochereau. Nous sommes dans un quartier marqué par le souvenir de nombreux monastères catholiques : l’abbaye de Port-Royal, devenue la maternité du même nom (123, boulevard de Port-Royal) ; le monastère de la Visitation, toujours en activité (68, avenue Denfert-Rochereau) et où se trouve une boutique de produits monastiques ; l’ancienne maternité Saint-Vincent-de-Paul (76, avenue Denfert-Rochereau), aujourd’hui en cours de destruction pour devenir un « écoquartier », et qui a accueilli pendant près de cinq ans les Grands voisins, une friche culturelle avec des ateliers d’artistes, un centre d’hébergement d’urgence, une boulangerie et un bar, une salle de conférences et de concerts, des restaurants…  En face des Grands voisins se trouve le Centre Myriam David de l’association Notre-Dame de Joye qui accueille des enfants handicapés. C’est dans ce centre, mitoyen de l’observatoire, que se trouve la maison du Fontainier. 

4/ Place Denfert-Rochereau, les catacombes et la plus ancienne gare parisienne encore en activité (14e)

Au centre de la place se trouve le Lion de Belfort, monument commémoratif de la guerre de 1870-1871 et de la résistance acharnée des troupes du colonel Rochereau à Belfort. Le lion regarde en direction de la statue de la Liberté de l’île aux Cygnes (15e), laquelle est tournée vers la « vraie » statue de la Liberté, celle de New-York. Le lion, comme les deux statues de la Liberté, sont l’œuvre d’un même artiste, Bartholdi. Sous le lion de Belfort se trouvent les catacombes, anciennes carrières de pierre où peu de temps avant la Révolution on déménagea les restes de plusieurs millions de Parisiens extraits du cimetière des Innocents, aujourd’hui les Halles. Passe également sous la place l’aqueduc de Marie de Médicis, avant qu’il n’oblique en direction de la maison des Fontainiers.

En surface, de part et d’autre du Lion, se trouvent les deux pavillons de la barrière d’Enfer, l’ancienne barrière d’octroi de l’enceinte des Fermiers généraux (anciennes douanes où l’on payait des taxes pour faire entrer les marchandises dans Paris sous l’Ancien régime). Aujourd’hui, ces pavillons abritent le musée de la Libération de Paris et l’entrée du musée des Catacombes.

Prenez la direction de la gare de Denfert-Rochereau, aujourd’hui gare du RER B, et qui fut créée en 1846. C’est la plus ancienne gare de Paris encore en activité. Longez la gare et prenez la direction de l’avenue René Coty, que vous descendez en suivant son allée centrale arborée, l’allée Samuel Beckett.

A 100 mètres de la gare RER, à droite de l’avenue, surmontant un petit monticule au milieu d’une pelouse grillagée, se trouve un tout petit bâtiment de pierre qui évoque l’architecture d’un temple antique : c’est le regard XXV de l’aqueduc Médicis, porte d’entrée d’un escalier qui permettait de descendre inspecter l’aqueduc et y effectuer des travaux d’entretien. Le bâtiment derrière le regard est l’ancien hôpital de La Rochefoucauld, construit sous Louis XVI, et dont une partie est en cours de destruction. 

5/ Le réservoir et le parc de Montsouris, avec un petit aperçu de l’aqueduc de Lutèce (14e)

Vous suivez l’avenue René Coty jusqu’à la rue d’Alésia, au coin de laquelle vous prenez un escalier. C’est le début de la rue des Artistes, qui mène vers les réservoirs de Montsouris, construits par Belgrand à la fin du Troisième Empire pour y stocker l’eau apportée depuis l’Aube par les aqueducs de la Vanne et du Loing. 20% de l’eau consommée par les Parisiens y passe chaque jour. En suivant  la rue Saint Yves, vous longez les réservoirs avant de vous retrouver devant l’entrée du parc Montsouris. Avant d’y entrer, faites un tout petit crochet par le 42 avenue Reille : entre les piles du pont du RER et une boutique de produits bio, derrière une petite vitrine à ras du sol, se trouvent des restes de l’aqueduc romain de Lutèce. Les férus de vieilles pierres peuvent marcher 150 mètres, jusqu’au 7 de la rue de l’Empereur Valentinien. La vue sur l’ancien aqueduc y est plus impressionnante. Et juste en face, dans le jardin de l’Aqueduc, se trouve le regard XXIII de l’aqueduc de Marie de Médicis.

Entrez maintenant dans le parc Montsouris. Culminant à 78 mètres et couvrant 15 hectares, ce parc, connu comme l’une des sept collines de Paris, fut créé  sur d’anciennes carrières par Napoléon III, qui voulait doter d’un espace vert chacun des points cardinaux de Paris. Le parc doit son nom, dit-on, aux souris qui pullulaient sur les berges de la Bièvre, une petite rivière aujourd’hui enterrée qui longeait la colline par l’Est. On le traverse en suivant la voie ferrée, en direction de la magnifique gare RER de la Cité universitaire. 

6/ De la Cité universitaire internationale (14e) à la promenade de l’aqueduc enterré à Arcueil (Val-de-Marne)

De l’autre côté du boulevard des Maréchaux se trouve le troisième plus grand parc de Paris, avec 34 hectares de verdure : la Cité internationale universitaire de Paris. Cet ensemble unique a été imaginé après la Première Guerre mondiale dans l’idée d’offrir un endroit où des étudiants du monde entier pourraient étudier et se rencontrer, pour construire le monde de demain. Édifiée sur les anciennes fortifications de Paris, détruites en 1919, la Cité internationale est composée d’une quarantaine de maison d’étudiants, certaines sous un pavillon national et d’autres financées par des mécènes, comme l’américain Rockefeller qui a contribué à la construction du vaste bâtiment qui se trouve à l’entrée de la Cité – il aurait été inspiré par Chambord – et qui comporte une cantine, un théâtre, une piscine et une banque. En traversant ce bâtiment, on rejoint une grande pelouse qui court jusqu’au périphérique – lequel n’existait évidemment pas quand a été imaginé la Cité internationale.

Au bout de la pelouse, en direction d’Arcueil se trouve un bâtiment moderne : c’est la cité des étudiants de la Région Île-de-France. A sa droite, la maison des étudiants cambodgiens, que voisine celle des Allemands et un curieux bâtiment moderne, la maison de l’Iran, construite en 1969 et abandonnée en 1979 après la révolution islamique, et que la ville de Paris vient de rénover. Vous vous dirigez ensuite vers la sortie de la Cité universitaire en longeant les bâtiments néo-britanniques de la Fondation Deutsch de la Meurthe, du nom d’un magnat lorrain du pétrole. 

7/ Le coteaux d’Arcueil et le triple aqueduc de la Vallée de la Bièvre (Val-de-Marne)

Une fois le périphérique traversé, on se retrouve devant la Promenade de l’aqueduc. Il s’agit d’une vaste allée créée au-dessus de l’aqueduc de la Vanne, en partie située sur les communes de Paris, d’Arcueil et de Gentilly. Cette perspective de près d’un kilomètre est ornée de 18 œuvres en acier inoxydable du sculpteur Claude Viseux, qui travailla longtemps à Arcueil, ville qui fut une sorte de « base arrière » de Montparnasse au XXe siècle. Picasso y apprit la sculpture soudée, les peintres y achetaient toiles, châssis et tubes de peinture.  

On traverse ensuite le quartier de la Vache noire – connu pour son centre commercial, que l’on contounre en traversant la petite cité piétonne de le Vache noire, pour  rejoindre le parc Paul Vaillant Couturier et son panorama sur la vallée de la Bièvre, avant de descendre faire la connaissance du triple aqueduc d’Arcueil, désormais aérien. L’aqueduc de Napoléon III prend appui sur celui de Marie de Médicis, dont on aperçoit un regard, au niveau des marches piétonnes, rue Besson. Pour découvrir des restes de l’Aqueduc de Lutèce, il faut continuer jusqu’au Conservatoire de musique de Cachan (avenue Cousin de Méricourt). Dans les murs de cet ancien château du XVIe se devine une arche écroulée et quelques piles encastrées. Vous êtes alors au fond de la vallée, la Bièvre enterrée coule quasiment sous vos pieds. De là, vous pouvez remonter par la rue du Chemin de fer pour regagner la gare d’Arcueil-Cachan en quelques minutes.

L’observatoire de Paris / © Vianney Delourme pour Enlarge your Paris
La maison des Fontainiers. Vianney Delourme pour Enlarge your Paris
Le Lion de Belfort / © Vianney Delourme pour Enlarge your Paris
Un regard de l’aqueduc Marie de Médicis dans le 14e / © Vianney Delourme pour Enlarge your Paris
La rue des artistes, colline de Montsouris / © Vianney Delourme pour Enlarge your Paris
Le Parc Montsouris, construit sur d’anciennes carrières. Vianney Delourme pour Enlarge your Paris
La Cité Internationale universitaire dans le 14e / © Vianney Delourme pour Enlarge your Paris
Passage sous le périphérique / © Vianney Delourme pour Enlarge your Paris
Promenade de l’aqueduc, entre le périphérique et le quartier de la Vache noire, à Arcueil. Œuvre du sculpteur arcueillais Claude Viseux. Vianney Delourme pour Enlarge your Paris
Maison en meulière à Arcueil / © Vianney Delourme pour Enlarge your Paris
L’aqueduc de la Vanne / © Vianney Delourme pour Enlarge your Paris
La gare d’Arcueil-Cachan / © Vianney Delourme pour Enlarge your Paris
La gare d’Arcueil-Cachan ouverte à l’époque de la ligne Denfert-Rochereau – Sceaux / © Vianney Delourme pour Enlarge your Paris

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