Société
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Dans les Yvelines, la possibilité d’une île

Faire pousser un écovillage sur une île de la Seine autrefois station balnéaire et aujourd'hui en friche, c'est le projet porté par le collectif Mainstenant qui lance ce 25 février un crowdfunding.

L'île du Platais dans les Yvelines / © Etienne Narcy

Réhabiliter des espaces à l’abandon en éco-lieux ouverts à tous. Ce défi est celui que se sont donné les neuf co-fondateurs de l’association Mainstenant. Depuis leur rencontre place de la République lors du mouvement Nuit Debout, ils (anthropologue, journaliste, cartographe, entrepreneur, architecte…) se sont mis en quête de friches en bordure des métropoles afin d’échapper à l’étouffement qui menace ces dernières.

Et pour son premier projet, la belle équipe a eu la folie des grandeurs : redonner vie à une station balnéaire des années Trente pour en faire une sorte de village-témoin où l’agriculture urbaine serait reine, la plage de Villennes sur l’île du Platais (78). De l’aquaponie dans le bassin, une mini-ferme, des jardins partagés, les idées ne manquent pas pour initier un chantier qui se veut avant tout collaboratif. L’engagement est profond et s’assume politique avec pour conviction que c’est en puisant dans la force collective que l’on pourra atteindre une transition sociétale et s’émanciper des modèles actuels. “La meilleure arme pour la transition, c’est l’éducation”, affirme Jean-Marie Vrecq, un ancien prototypiste, aujourd’hui membre à plein temps du collectif.

 

La plage de Villennes sur l'île du Platais (78) / © Manu G.

La plage de Villennes sur l'île du Platais (78) / © Manu G.

Des cabines de bain métamorphosées en galerie d’art

Inaugurée en 1935 et fermée en 2002, l’ancienne base de loisirs de style Art Déco,  classée monument historique en 2009, accueillait jusqu’à 9 000 personnes à la belle époque. Sa centaine de cabines de bain, Mainstenant imagine en faire une galerie d’art atypique, où chaque cabine serait confiée à un artiste. Nicolas Voisin, autre membre de l’association et ancien fondateur du média Owni, insiste sur l’importance de préserver l’ADN du territoire : “C’est déjà un lieu d’urbex, d’exploration, et on l’aime tel qu’il est. Nous voulons le transformer au minimum.”

L’occupation se veut d’ailleurs éphémère, organisée et légale. L’association mène en ce moment des négociations avec la mairie de Médan (dont dépend l’île) et la société d’exploitation de la plage de Villennes, qui souhaite à long terme y installer un complexe balnéaire haut de gamme. La zone étant inondable, et les habitants des lieux exigeants, quatre projets hôteliers ont déjà avorté.

La plage de Villennes sur l'île du Platais (78) / © Manu G.

Plage de Villennes sur l'île du Platais (78) / DR

 

Car l’ancien complexe aquatique ne représente qu’une partie de l’île, isolé de la zone habitée baptisée le Domaine de Physiopolis. Le domaine est une co-propriété privée, dont les habitants, tels d’irréductibles gaulois, préservent l’esprit originel du lieu, bâti quelques années avant la piscine. En 1927, les frères Durville, tous deux médecins hygiénistes, s’installent sur l’île du Platais, bout de terre de 42 hectares qui s’étend de Médan à Triel-sur-Seine, en passant par Villennes-sur-Seine (78). André et Gaston Durville invitent une petite communauté à les rejoindre dans ce coin de paradis, à l’abri des regards. Loin de la ville, la tenue réglementaire est légère pour ces naturistes précurseurs : un maillot de bain ou rien. Peuplée de trois cent mini habitats (de 3m² à 18 m²), type cabanes de pêcheurs en fibrociment, l’île est aujourd’hui encore nimbée de cette ambiance de vacances éternelles, à vingt-cinq minutes de Paris.

Cabane du domaine de Physiopolis sur l'île du Platais (78) / © Manu G.

Physiopolis sur l'île de Platais / © smithereens.fr

Réveiller les lieux abandonnés

Débordante d’inspiration, l’équipe de Mainstenant se positionne également sur un autre grand chantier de réhabilitation, à Esbly (77). Et le hasard faisant bien les choses, il s’agit également d’une ancienne piscine, municipale cette fois.  Mais l’association n’entend pas se restreindre aux frontières de l’Île-de-France. Au printemps prochain, elle lancera une campagne d’information auprès des 36.000 maires de France pour favoriser l’émancipation des territoires abandonnés. Une sorte de réveil de la force, mais tranquille.

 

Mainstenant lance ce 25 février un crowdfunding sur la plateforme KissKissBankBank. L’objectif, chiffré à 20.000€, est d’acheter et de transformer l’un des cabanons de l’île de Platais en grainothèque et serres partagées .

Et pour plus d’infos sur Mainstenant, rendez-vous sur mains-tenant.tumblr.com

L'île du Platais (78) / © Manu G.