
On est loin des plumes et des paillettes. Ici, au Cirque Electrique, c’est plutôt dentelle, cuir noir et numéros de haut vol avec le Cabaret Décadent qui présente sa toute nouvelle revue N°69 ! Un cirque charnel et punk dans la forme comme dans le fond qu'Emmanuelle, fondatrice du blog Paris derrière, nous raconte.
Voilà presque 5 ans que le Cirque Électrique fait vibrer avec son Cabaret Décadent. Autant dire qu’il y a du savoir-faire. La revue s’appelle N°69. Année érotique ? Facile ! En fait non. C’est plutôt l’inversion : le 6 à l’envers, c’est un 9. L’inversion sera effectivement l’un des mots d’ordre de la soirée.
Mais tout d’abord, j’entre sous le chapiteau rouge. Une partie des artistes vous accueille tout sourire et vous place, comme la chanteuse et musicienne Maria Fernanda de Caracas. Les portes ouvrent à 19h, vous pouvez alors ripailler avant le spectacle et pendant, sachant que le bar se trouve sur la piste. Il est ouvert de 19h à 21h, puis à l’entracte. C’est très chaleureux et pas cher (menu entre 19/23 € avec saumon mariné à la betterave, tajine de poulet au citron confit ou des planches « charcuteries » « fromages ».) On est servi par un beau jeune homme looké glam rock en patins à roulettes.
Les lumières baissent. Apparaît Monsieur Loyal : Otomo de Manuel. Je le croise depuis quelques années dans le milieu sexo alternatif. C’est un artiste-performeur incontournable de l’érotisme avant-gardiste : mélange de prestance et de sensualité animale, voix tripale tripante, charme vénéneux et humour caustique. Otomo porte magnifiquement une tenue inspirée de celle d’un chef d’état d’une république bananière. Bokassa en résille et bottines à talons-aiguille bicolores ! Petit martinet à la main. Cher Otomo, tu es parfait !
Une équilibriste monte avec des chaussons à pointe sur des verres à pieds, vous en aurez le souffle brisé. Une funambule parvient à tenir debout sur un câble, sauter, rebondir avec ses fesses sur le fil, et remonter direct debout… sur le fil. J’hallucine, je crois qu’il y a un truc dans ma bière ! Chaque semaine, le Cabaret Décadent invite un artiste. Je tombe sur un virtuose de la pole dance : Quentin Dée. L’athlète a sculpté son corps pour lui donner des formes féminines. Troublant…

Une explosion de couilles de chinchillas
Ça s’emballe avec une explosion de couilles de chinchillas, causée par un jongleur hors-pair suivie d’une bonne sœur équilibriste et court-vêtue. Vous découvrirez le sulfureux Monsieur Poudre, un zeste maso qui sert de meuble à post-its qu’Otomo lui agrafe sur la peau. Dommage parfois que la sono ne soit pas très bonne, je n’entends pas toujours bien les dialogues entre Otomo et les personnages. Ou alors, je deviens sourdingue même si je suis emportée par les rythmes électro tordus, les riffs fous, la batterie hypnotique, musiques et textes originaux signés Hervé Vallée, le patron du Cirque Electrique.
En fait, ce sont des numéros de cirque classique, réalisés par des artistes qui viennent des grandes écoles, notamment Annie Fratellini. Ces prouesses sont revisitées de façon contemporaine, punk glam rock. Le fond est érotique, la manière dont bougent les artistes est très sensuelle. Héritier de la tradition des cabarets berlinois des années 1920, le Cabaret Décadent se veut contestataire et utopique face au monde virtuel, « les bordels de robot, le bordel que foutent les robots » comme le fustige Otomo. Le salut passe par le sensuel. La mise en scène de cette apocalypse permet une mise en abyme, une mise à distance salutaire. Oulala ! on dirait du Télérama, je ne sais pas ce que j’ai bu pour écrire comme ça !
Bon, pour résumer, le Cabaret Décadent nous retourne les tripes plus qu’il n’excite. Au cirque, les artistes risquent leur vie devant vous. Ce n’est pas du virtuel. Ça peut être mortel (il n’y a aucun filet). Le tout mêlé habillement à une charge érotique. Éros et Thanatos sous les projecteurs en somme.
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21 mars 2019 - Paris