Société
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Vis ma vie de maman célibataire à Montrouge

Maison playmobil
© Steve Stillman / Réalisation : Juliette Charles-Duquenne

Emmanuelle Michelle est mère célibataire à Montrouge (92). Un sport de compétition dont elle décrit les coulisses à travers ce vibrant témoignage.

 

Montrouge. Une ville devenue au fil du temps très prisée. Infrastructures sportives, nombreuses crèches, métro, restos sympas et population plutôt jeune. Une aubaine donc pour les trentenaires comme moi. Le hic ? J’ai fait deux enfants. Ce qui signifie que le temps ne m’appartient plus. Et ce encore moins depuis que j’ai embrassé la carrière de mère célibataire.

Ne nous y trompons pas : ma vie est plutôt belle parce que mes filles sont en excellente santé et que j’ai la chance de ne pas être unijambiste. Un atout indéniable lorsqu’il s’agit de courir partout. D’ailleurs c’est simple ; pour être mère célibataire, il faut avant tout avoir de bons mollets et de bons bras, parce que les loyers à Montrouge ne permettent pas vraiment le rez-de-jardin, les 100 mètres carrés et la place de parking. Pour planter le décor : j’habite donc au cinquième sans ascenseur dans un charmant petit appart « années 30 » au parquet qui grince. Ma fille aînée de cinq ans trouve tout à fait cool que l’on ait une « chambre-salon » et des cheminées « désaffectées » qui font office de maisons des poupées.

Ce qui est moins cool, c’est la voisine du dessous, qui me laisse ce genre de mots doux sur ma porte : « Vos filles marchent sur le parquet le matin à 7h30 et me réveillent. D’autre part, elles ne se couchent jamais avant 20h30. Trouvez une solution ». La promiscuité, bien connue des Parisiens, est aussi une caractéristique de Montrouge qui serait la cinquième commune la plus dense de France, paraît-il. Tellement dense qu’il y existe des bouchons de poussettes. L’expérience aidant, on apprend à dénicher le coin de trottoir le moins embouteillé aux heures de pointe et à éviter la vieille dame capable de compromettre à elle-seule l’arrivée à l’école à 8h30. Sans parler des files ininterrompues de trottinettes. Il suffit d’une chute de mioche pour mettre dix parents de mauvais humeur à la bourre.

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Ecole Playmobil
© Steve Stillman / Réalisation : Juliette Charles-Duquenne

 

Like a bobo in the green city of Redmount

Qui dit surpopulation dit également squares riquiquis avec deux enfants au mètre carré au bas mot et des pigeons qui connaissent sur le bout des pattes les meilleurs spots pour grignoter les quatre-heures tombés par terre. Des goûters à l’épeautre et au pavot achetés dans les nombreux magasins bios de la ville. Quel vil géniteur oserait sortir le bon vieux Savane à l’huile de palme mis à part la mère célib, fauchée par essence ? Le truc qui console c’est que les mômes préfèreront toujours un bon vieux Papy Brossard plein d’OGM. Mais ce n’est pas l’argument dont je suis la plus fière.

Alors, peut-être vous demandez-vous ce qui me plaît à Montrouge et si je ne rêve pas secrètement de me réinstaller à Paris avec mes deux chers enfants ? Jamais ! Tout simplement parce qu’en trois minutes de ligne 4 ou 6 minutes à pieds, j’y suis. Alors y dormir pour encore plus cher qu’à Montrouge… Et puis ma voisine du dessous – pas la folle du bruit mais une autre, marionnettiste – m’a fait découvrir la compagnie Blin pour laquelle elle travaille et qui propose des spectacles pour enfants en mal d’espaces verts et de poésie. J’aime aussi Montrouge parce qu’un week-end ne se passe jamais sans une fête, une petite brocante, une expo, un mini-concert. J’aime Montrouge parce que c’est un village où tout le monde se connaît, où les commerçants offrent des fraises aux enfants pas contents, où l’on peut prendre des apéros à la Quincaillerie Générale dont les serveurs ne vous regardent pas comme une pestiférée si vous avez une poussette. J’aime Montrouge mais je la quitte pour rejoindre non pas Paris mais une petite ville trois kilomètres plus loin, côté 9-4, qui un jour sera desservie par le Grand Paris Express. De quoi simplifier la vie de toutes les mères célib’ et actives.